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LABEL • Le Château Rochefort et l’Abbaye de Romont vont désormais viser une certification bio jugée «plus prometteuse». Rien à voir, selon la Municipalité, avec le parfum de soufre qui entoure la certification Demeter dont les fondements sont jugés «douteux» par certains conseillers communaux.
Grande nouveauté pour les vignobles de la Ville de Lausanne. La Municipalité annonce en effet renoncer à la certification Demeter fondée sur les principes de la biodynamie et qui labellisait deux de ses cinq domaines, le Château Rochefort à Allaman et l’Abbaye de Mont au Mont-sur-Rolle. «Le vin sous label Demeter reste un marché de niche et le passage en bio de l’ensemble des vignobles de la Ville est plus prometteur à de nombreux égards. Et pour rappel, tous (nos) domaines de Lavaux sont déjà passés en bio», explique la municipale Natacha Litzistorf, en charge des domaines.
Ce changement aurait-il un lien avec le petit parfum de soufre qui entoure la fédération Demeter, à l’origine du label éponyme qui certifie les aliments issus de l’agriculture biodynamique? Que nenni, affirme l’édile pour laquelle les méthodes de biodynamie, «préservant la santé de l’environnement et de la population, ont fait leurs preuves et pourraient être conservées».
«Tombé des nues»
«Le label Demeter est un label que l’on retrouve couramment et qui a une connotation positive en matière d’écologie. Mais je suis tombé des nues en constatant que la fédération Demeter qui le délivre a des fondements douteux car elle se base sur les théories de Rudolf Steiner, qui a tout de même tenu des propos racistes et antisémites», explique le conseiller communal socialiste Samuel De Vargas, à l’origine d’une interpellation à ce sujet déposée en octobre dernier. Ce dernier ajoute: «Les exigences pour obtenir ce label m’interpellent aussi car on y parle de «dimensions cosmiques de la terre» et de traitement des sols à base de cornes de vaches remplies de bouse puis enfouies dans la terre où elles passent l’hiver».
Depuis 1998…
Samuel de Vargas n’est d’ailleurs pas le seul élu à s’interroger sur les méthodes de la biodynamie. Avant lui, en mars dernier, l’élue Ensemble à Gauche Anaïs Timofte avait également abordé cette problématique en séance du Conseil communal. Elle avait ainsi relevé que «la biodynamie s’appuie sur des concepts forts douteux comme les énergies cosmiques et les forces formatrices, ou encore sur des processus tout aussi douteux comme le suivi du calendrier lunaire pour planter et récolter les cultures, ce qui est loin de faire l’unanimité dans le monde scientifique». Et de questionner la Municipalité: «pour quelles raisons la Ville de Lausanne soutient-elle des méthodes de production ésotériques en finançant l’agriculture biodynamique, notamment par la production d’un vin?».
Pour rappel, la biodynamie dans les Domaines de la Ville a démarré en 1998 à Rochefort à la suite d’essais effectués par le vigneron tâcheron. Consécutivement à cette expérience positive, le domaine de Rochefort a été labellisé en 2013. Lors de la décision d’internaliser les domaines en 2014, il a ensuite été décidé par la Municipalité de l’époque de labelliser également l’Abbaye de Mont.
Protéger la santé
«La Ville de Lausanne s’engage, en ligne avec son programme de législature, à se concentrer sur des méthodes qui permettent de protéger la santé des consommatrices et consommateurs et de préserver les ressources naturelles. L’arrêt de l’utilisation de produits phytosanitaires de synthèse issus de l’industrie chimique implique de trouver des solutions alternatives, et la Ville teste et expérimente, explique Natacha Litzistorf. Certaines techniques préconisées par Demeter, comme l’application de préparations à la vigne telles que la prêle, la bouse de corne ou la silice portent leurs fruits. Nous considérons qu’il n’y a rien d’étrange quand ça marche!»
Quant aux liens entre Rudolf Steiner et la biodynamie, la municipale précise que «Demeter est un label consacrant un mode de production et pas une religion. C’est ainsi que la Ville l’applique. Les associations de biodynamie se sont distancées des positions des fondateurs du mouvement et la Ville de Lausanne n’a pas de lien avec le mouvement anthroposophe créé par Rudolf Steiner.»