La Maison du Peuple rénove et s’agrandit

Rédigé par
Charaf Abdessemed
Lausanne

VIE ASSOCIATIVE • Le 9 décembre dernier, la Maison du Peuple a mis trois nouvelles salles à la disposition du public. Elle reste un des rares lieux à Lausanne à proposer des prix attractifs pour les associations. 
Jadis, on la surnommait «Le Kremlin», ce qui en disait long sur l’orientation idéologique et militante de ses occupants. Aujourd’hui, elle est victime de son succès et voit plus l’avenir en rose qu’en rouge. 
Bâtie en 1961, la Maison du Peuple située à Chauderon, très connue des Lausannois, affiche une santé éclatante et des ambitions à revendre, toujours avec pour mission d’offrir aux «organisations ouvrières un lieu de réunion et de culture à Lausanne». 
1000 événements par an
La preuve? Dès le 9 décembre prochain, elle mettra à la disposition du grand public et des associations trois nouvelles salles, respectivement de 50, 30 et 12 places chacune, à réserver en ligne sur son site internet. Cours de théâtre, églises, thés dansants, assemblées de partis, activités d’enseignement, les demandes sont variées, multiples et surtout très nombreuses. «Dans nos locaux, nous accueillons plus de 1000 évènements chaque année, explique Julien Eggenberger, président du conseil d’administration de la Maison, dont il assure la gestion au quotidien. Et pour la location de salles, nous sommes débordés de demandes et il fallait bien faire quelque chose pour y répondre». 
Très bien située, avec des locaux bon marché, la Maison du Peuple ne désemplit pas, d’autant que les autres emplacements situés à Lausanne mis à la disposition des associations ont soit disparu comme à la gare, soit sont eux-mêmes régulièrement débordés. Alors, il a fallu mettre l’ouvrage sur le métier pour aménager à partir du mois de janvier dernier, ces nouvelles salles sur une partie de l’ancien cinéma, ainsi que sur d’ancien dépôts et escaliers. D’imposants travaux comprenant des démolitions et qui, en tenant compte d’autres menus ouvrages de rénovation ainsi que les très coûteuses mises aux nouvelles normes incendie, auront coûté plus de 11 millions de francs. «Nos revenus locatifs, y compris ceux des appartements situés dans la Maison nous permettent de faire tourner le tout, en dégageant une petite marge pour investir dans les rénovations. Mais lorsque nous devons consentir des travaux de cette ampleur, nous devons avoir recours à des emprunts bancaires et faire appel à nos sociétaires», constate Julien Eggenberger.
Propriété d’une coopérative 
Totalement indépendante, la Maison du Peuple est en effet la propriété d’une coopérative fondée en 1916 et forte de près de 400 sociétaires, particuliers ou organisations. Formée de deux immeubles accolés, l’un donnant sur Chauderon l’autre sur le Flon, elle comprend 12 étages, et propose des salles de réunion – six si l’on compte les trois nouvelles ouvertes le 9 décembre –, 18 appartements dont une bonne partie à vocation sociale, ainsi que des bureaux. 
«On nous demande régulièrement de louer à des fitness ou autres activités commerciales, mais nous refusons car ce n’est pas notre mission, explique le directeur. Notre mission consiste à soutenir les différentes associations et organisations à but non lucratif en leur proposant des locaux à des prix acceptables».

Un ouvrage consacré aux Maisons  du Peuple de Lausanne 

Institutions-phares de la vie lausannoise, les deux Maisons du Peuple de Lausanne (d’abord à la rue de la Caroline, puis à Chauderon) ont joué un rôle de pivot culturel et politique dans la vie lausannoise. Durant toute la première moitié du XXe siècle, la Maison du Peuple est un phare de la vie ouvrière et syndicale, mais aussi de la vie culturelle. Des orateurs prestigieux comme le socialiste belge Emil Vandervelde, le mahatma Gandhi, les écrivains Romain Rolland, Jean Giono, Henry de Montherlant, Paul Claudel, Jean Cocteau, Louis Aragon, Henri Bordeaux, le poète Emile Verhaeren, le psychiatre Auguste Forel, Pierre de Coubertin, le compositeur Vincent d’Indy et bien d’autres y ont attiré les foules. Les concerts y étaient réputés et l’Orchestre de chambre de Lausanne y fut créé, tandis qu’une salle de cinéma aujourd’hui disparue, ajoutait encore à cet attrait culturel. Dans un style vivant, l’auteur Olivier Pavillon dresse un portrait richement détaillé de ces deux lieux emblématiques dans un ouvrage accessible et fourmillant de nombreuses sources inédites.
Les maisons du peuple de Lausanne (1899-1945) Olivier Pavillon, éditions Antipodes.
 

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