VIE NOCTURNE • Le club Le Folklor fête ses huit ans à la place de la Riponne. Après la pandémie, des accusations et l’ouverture d’un local d’injection voisin, voici l’occasion de faire le point de la situation sans tabous avec les trois patrons de ce temple des musiques électroniques.
Ils sont les héritiers de la défunte Ruche, au bout de la rue de La Tour à Lausanne. Les aficionados d’une minimal electro se souviennent encore de ce lieu qui avait émergé entre les murs d’un ancien bar à Champagne. Contraint par les autorités de déménager en 2016 en raison d’un nouveau statut du quartier, Fabien Gehrig, Ramon Lorenzo, Thierry Namer et d’autres collaborateurs avaient alors accepté l’accord de venir créer une «discothèque» dans une ancienne salle de répétition de la fanfare municipale, au nord de la place de la Riponne. Huit ans plus tard, les compères, également DJ, soufflent en musique sur les huit bougies. D’ordinaire discrets dans les médias, ils nous ont accordé une interview.
Lausanne Cités: Une première question simple, comment allez-vous?
Ramon: Nous allons plutôt bien, nous travaillons beaucoup et nous remboursons nos dettes dues à la pandémie de Covid.
Thierry: Nous avons aussi évolué et nous programmons de plus en plus de musique électro qui nous correspond.
Vous subissez depuis août des travaux considérables sur la Riponne, avec des barricades. Votre entrée n’est plus visible et il faut faire un détour pour parvenir au Folklor...
Fabien: Et il manque une signalétique. Cette énorme surprise nous a même obligés à déplacer notre event du premier août prévu devant notre club alors que tout était déjà prêt.
Souffrez-vous d’un manque de considération de la part des autorités?
Thierry: Evidemment. De manière générale, les élus locaux préfèrent se rendre dans des lieux à qui ils attribuent des subventions. En tant que club alternatif non subventionné, nous ne sommes pas considérés comme un lieu culturel. Alors qu’à Zurich, sa culture techno est inscrite au patrimoine immatériel de l’UNESCO depuis l’été 2017.
Une taxe lausannoise vous dérange également...
Thierry: Pour pouvoir rester ouvert jusqu’à 6 heures du matin, une taxe communale nous est imposée entre 3 h et 6 h. Celle-ci n’est pas proportionnelle à la capacité d’accueil des établissements: un petit club paie exactement la même somme qu’une grande discothèque!
Comment se passe votre cohabitation avec le deuxième local d’injection pour toxicomanes, ouvert à côté du Folklor?
Thierry: Entre ce local d’injection qui ferme trop tôt le soir, les toilettes publiques de la Riponne toujours ouvertes, transformées alors en shootoir la nuit, et le lieu de réunion des toxicomanes, appelé le String toujours toléré sur la même place, tout cela a créé un appel d’air de personnes en manque et de dealers. Des cas d’agression, de vol, de harcèlement ont augmenté. Nous subissons cela alors que nous avions mis en garde la Municipalité. Nous avons engagé plus d’agents à nos frais et nous devons mieux filtrer à l’entrée.
Fabien: Nous essayons de travailler main dans la main avec les autorités mais nous souffrons de leur manque d’anticipation.
En 2021, trois jeunes femmes avaient clamé avoir été agressées dans le Folklor sans réaction du personnel. Cela avait eu un écho au Conseil communal. Puis en 2023, c’est un politicien socialiste qui a accusé vos agents de sécurité de l’avoir brutalisé pour des raisons «homophobes». Il a porté plainte et appelé à votre boycott. Comment avez-vous vécu ces bad buzz?
Fabien et Thierry: Mal, car la philosophie de notre club est d’accepter l’ensemble des diversités. Nous veillons à ce qu’on se sente en sécurité dans notre établissement. Nous avions encouragé ces jeunes femmes à porter plainte, en vain. Nous avons mené une réflexion avec nos équipes et multiplier les caméras de sécurité. Un numéro de téléphone, un code QR ainsi qu’une adresse e-mail sont également affichés sur nos murs pour tout incident éventuel. Quant à la plainte du politicien, elle a été classée par le procureur. Un recours a été déposé qui a débouché sur un renvoi de l’affaire sur des aspects formels. Nous collaborons avec le ministère public et sommes confiants sur l’issue de cette affaire.
Des nouveautés au Folklor?
Thierry: Nos live: des musiciens qui jouent avec des deejays dès 21 heures certains jeudis.