PASSÉ • Il y a à Lausanne deux monuments en partie abandonnés; on les voit à peine et personne n’y prête attention.
C’est un peu comme si l’on voulait les cacher ou les oublier: il y a à Lausanne deux monuments en partie abandonnés. Le premier se trouve au bout de la ville, côté est, proche du lac: le pavillon thaïlandais, cadeau du roi Bhumibol (Rama IX), qui vécut 18 ans à Lausanne. Faisant face à l’opposition de riverains, la Municipalité a fini – au bout d’interminables polémiques – par le faire installer au parc du Denantou. Construit par des artisans venus de Thaïlande, recouvert de 100’000 feuilles d’or, le monument est à la fois extrêmement raffiné et terriblement clinquant. Inauguré en 2009 en présence de la princesse Sirindhorn (fille de Rama IX), le pavillon reste un lieu de pèlerinage pour les touristes thaïlandais.
Guillaume Tell
L’autre bâtiment esseulé, installé au bout de la promenade de Montbenon, a été offert à la ville par Daniel Iffla, dit «Osiris». Ce philanthrope amateur d’art voulait remercier la Suisse pour l’accueil qu’elle réserva aux soldats français du général Bourbaki après la déroute de la guerre de 1870. Il fit d’abord don d’une statue de Guillaume Tell, héros national. Proposée à la ville de Berne qui la refusa, la sculpture, œuvre du Français Antoine Mercié, fut inaugurée en 1902 et trône aujourd’hui devant le palais de Montbenon. Osiris ne s’en tint pas là: il voulait joindre à la statue une chapelle, sur le modèle de celle de Seelisberg dans le canton d’Uri.
L’affaire fut l’occasion d’une sanglante polémique à propos de ce curieux donateur, commerçant juif. La chapelle, projet de Georges Épitaux, fut inaugurée en 1917, en pleine guerre mondiale. Elle était ornée de trois fresques d’Ernest Biéler, au style proche de l’Art nouveau, retraçant les faits marquants de la vie du héros national. En 1962, les fresques ont été transférées, après rénovation, dans le hall du tribunal voisin, où elles sont encore visibles.
Le texte de cette rubrique est tiré du livre «111 lieux à Lausanne à ne pas manquer», de Martine Dutruit (photos), Ulrich Doepper, Pierre Thomas et Michel Zendali (textes), éditions emons: www.111lieux.com
Disponible en librairie.