Le futur quartier de la Rasude ne convainc toujours pas ses opposants

Rédigé par
Elise Dottrens
Lausanne

URBANISME • Les plans du futur quartier de la Rasude sont à l'enquête depuis le 17 novembre. Remodelée suite à de nombreuses oppositions, la deuxième version reste clivante. Au point que certains en appellent à un référendum.

À l’angle de deux des rues les plus fréquentées de Lausanne, le quartier de la Rasude allie monuments historiques, du siècle passé, avec le modernisme du bâtiment Horizon. Et désormais, on sait à quoi il devrait ressembler, si les plans de la Ville de Lausanne pour le quartier, avec ses partenaires Mobimo et CFF Immobilier, devaient aboutir. Pendant trente jours depuis le 17 novembre, des images qui ont été soigneusement gardées au chaud jusqu'à ce jour sont désormais mises à l’enquête. 
Plus de verdure, d’espaces publics, des matériaux plus durables: la Municipalité est fière de son projet. «Le quartier de la Rasude fera la part belle à des espaces publics de qualité», explique la municipale en charge du logement, de l’environnement et de l’architecture Natacha Litzistorf. «Ils occuperont près de la moitié de la surface totale (9000 m2)  dont environ 40% sera végétalisé en accord avec les défis climatiques. 80 arbres majeurs au minimum viendront rafraîchir le quartier, tandis que l’essentiel des nouvelles toitures seront végétalisées, intégrant panneaux photovoltaïques, là où les toits ne sont pas accessibles.» Un maximum de béton recyclé sera utilisé, ainsi que des matériaux limités en carbone. 
Fâchés malgré les améliorations
Pour les opposants, ce nouveau projet reste démesuré. Depuis les premiers projets urbanistiques du quartier il y a bientôt 10 ans, l’association Perirasude se bat contre les idées proposées. «Si on le compare avec l’ancien projet, il a quasiment la même surface de bâti!», explique la présidente de l’association Silvia Egger. «Le projet est trop gros, trop structurant pour la ville.» Pour elle, c’est un projet démesuré. 
S’il ne nie pas qu’il s'agit d’une amélioration par rapport au dernier projet, Luca Ortelli, également sympathisant de l’association Perirasude et lui-même architecte, reste dubitatif sur le concept proposé: «On a l’impression d'un projet qui appartient à une époque antérieure à aujourd’hui. Nous avons une nouvelle sensibilité par rapport à l’écologie et aux matériaux de construction. Selon moi, l’écologie, c’est également le respect des règles architecturales et urbanistiques de la ville dans laquelle on opère. C’est la manière dont on organise un morceau de ville». Pour lui aussi, un projet d’une telle envergure doit être soumis au vote populaire. 
Après leur victoire pour la sauvegarde du bâtiment Laverrière, à l’avenue de la Gare 45, les opposants demandent donc que la décision soit tranchée en référendum, à l’image de la tour Taoua en 2014. Ils exigent également davantage de logements, contrairement au ratio proposé de 30% de logements contre 70% de locaux commerciaux. 
Ils déplorent aussi le manque de transparence qui entoure le projet, également porté par ses promoteurs, CFF Immobilier et Mobimo, unis dans la société de valorisation «SV Rasude». «Ce n’est pas transparent. On a vraiment l’impression qu’ils se font des échanges de bons procédés!», lâche Silvia Egger. 
Outil légal
Une accusation fallacieuse, selon la Ville: «Ceux qui prétendent que la Ville “fait des cadeaux aux propriétaires” ne sont pas bien informés, corrige la Municipale. Un Plan d’affectation, c’est exactement l’inverse d’un cadeau: c’est un outil légal contraignant qui formalise toutes les exigences publiques. Rien n’est laissé au hasard, tout est signé, et tout engage. La Ville de Lausanne, les propriétaires fonciers (SV Rasude) et les experts de différents domaines, dont le patrimoine, ont travaillé main dans la main pour proposer aujourd’hui un projet équilibré qui résulte d’un dialogue au profit d’une densification de qualité, des emplois et de la préservation du patrimoine, tout en étant à la hauteur des défis de logements et du climat.» 
Contacté, Mobimo abonde dans le même sens, via sa responsable communication en Suisse romande Hélène Demont: «Notre partenariat a pour but de mettre en commun les parcelles et de pouvoir développer le site de manière cohérente pour en faire un quartier harmonieux, intégré et connecté au tissu urbain lausannois, tout en proposant des rez-de-chaussée activés ainsi que des espaces publics qualitatifs pour l’ensemble de la population.»
Logements d’utilité publique
Incluant désormais la sauvegarde du bâtiment Laverrière, ainsi que des hauteurs revues à la baisse par rapport au dernier projet, le quartier tel que présenté se veut ainsi plus rassembleur. Parmi les logements proposés, une grande partie consiste en des logements d’utilité publique. Et désormais, le patrimoine est mieux conservé. «La quasi-totalité des bâtiments existants, dont celui sis à l’avenue de la Gare 45 de l’architecte lausannois Laverrière, seront conservés, et seul le bâtiment de la place de la Gare n°1 et les parties basses du bâtiments n°4 seront déconstruits, ajoute Natacha Litzistorf. Deux d’entre eux (Gare 45 et Horizon) pourront être surélevés d’un ou deux étages pour accueillir des activités et des logements. Seules deux nouvelles constructions compléteront le quartier: l’une le long des voies ferrées, avec un gabarit adapté au contexte de l’avenue de la Gare, l’autre au centre du quartier, juste en dessous de l’altitude de la Tour Edipresse.» 
Le plan d’affectation du quartier est désormais mis à l’enquête jusqu’au 18 décembre prochain. Quant à l'espoir de référendum des opposants, il devra venir du Conseil communal. 

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