
Actuellement, il existe 240 stations de téléphonie mobile à Lausanne, dont 152 déployées depuis 2019 et dotées de la technologie 5G. Malgré un délai d’opposition de 30 jours accordé aux résidents, la multiplication des installations se poursuit dans la capitale vaudoise, ce qui inquiète Fanny, une quadragénaire habitant Sous-Gare: «L’an dernier, la Ville a validé l’installation d’une antenne dans mon quartier, malgré une pétition signée par 400 personnes. Cela me préoccupe car je ne connais pas ses effets sur ma santé.» Natacha Litzistorf, municipale en charge du logement, de l’environnement et de l’architecture, nuance: «Les dispositions légales et la jurisprudence en la matière ne donnent pas les moyens juridiques à la Municipalité d’éviter l’installation d’une nouvelle antenne. Nous regrettons de ne pas bénéficier de moyens permettant d’assurer une planification cohérente et raisonnable sur notre territoire.»
Le problème soulevé par les opposants concerne notamment l’Ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant (ORNI), basée sur les directives de la Commission Internationale de Protection Contre les Rayonnements Non Ionisants (ICNIRP), une organisation souvent pointée du doigt pour ses liens présumés avec l’industrie des télécommunications: «L’ICNIRP ne tient compte que des effets thermiques des ondes électromagnétiques comme l’atteste une interview de son vice-président actuel dans l’émission Complément d’enquête de France2. Elle ignore cependant les effets biologiques potentiels, susceptibles de se manifester à des niveaux d’exposition inférieurs aux limites qu’elle a établies», déplore Etienne Vermeulen, ingénieur physicien EPFL.
Protéger les plus vulnérables
En janvier 2021, le groupe d’experts BERENIS, mandaté par la Confédération, avait relevé que plus de la moitié des études sur les cultures cellulaires révélait une hausse du stress oxydatif, connu pour être responsable de certaines maladies, même sous des rayonnements respectant les normes.
Les opposants, regroupés en associations ou collectifs, appellent ainsi à une réévaluation des bases scientifiques des limites actuelles. Ils insistent sur la protection des groupes vulnérables, comme les enfants, peu considérés, selon eux, lors de l’installation d’une antenne 5G sur le toit de la maternité à Morges. Ils soulignent également la lourdeur financière en cas de recours comme le rappelle Olivier Bodenmann, ingénieur EPFL et co-fondateur du collectif «info-EMF.ch»: «Cela décourage les recours, mais nous notons que des politiciens ont, par exemple, réussi à s’opposer à des installations près de leur domicile. Nous anticipons toutefois une augmentation des oppositions, une fois que les fréquences millimétriques seront autorisées.»
Bientôt la 6G
Du côté des principaux opérateurs du pays, ils assurent suivre scrupuleusement les directives fédérales, comme le précise Alicia Richon, porte-parole de Swisscom: «Nous comprenons les inquiétudes de la population et sommes à l’écoute. Nos installations respectent à tout moment les dispositions légales et les valeurs limites prescrites. La protection de la santé est donc entièrement garantie.» Cependant, l’avènement de la 5G+ et de ses ondes plus puissantes questionne. Les nouvelles fréquences FR2, ou ondes millimétriques, contrastent avec celles de la 4G et de la 5G, dites FR1, car elles risquent d’accroître l’exposition aux radiations. Interrogée à ce sujet, la porte-parole se veut rassurante: «Swisscom suit avec beaucoup d’intérêt le développement de la technologie vers la 6G. Les caractéristiques de la 6G sont en cours de discussion et la standardisation au niveau international devrait débuter à la mi-2024.»