
PRODIGE • À seulement 16 ans, Juan José Peña Aguirre recevra en 2026 son bachelor de la Haute Ecole de Musique de Lausanne. Violoniste et pianiste, l’adolescent rêve à l’avenir de diriger un orchestre. Rencontre avec un talent au parcours hors norme.
Au mois de mai, il a remporté la troisième place du Concours d’interprétation musicale de Lausanne, ex æquo avec un candidat de neuf ans son aîné. Depuis sa plus tendre enfance, Juan José Peña Aguirre suit la voie d’un vrai prodige musical. Entre cours et concours, concerts et voyages, sa vie entière est consacrée à la musique.
«Lorsque j’avais 4 ans, j’ai vu un violon dans la vitrine d’un magasin de musique. Je ne savais pas ce que c’était, mais j’ai dit: je veux ça!» C’était au Chili, où Juan José a vécu pendant 6 ans, après sa naissance en Colombie et quelques années passées dans différents pays d’Amérique latine. Ses grands-parents lui offrent le violon tant convoité, mais au départ c’est la déception. «Je trouvais cela inconfortable, je me suis dit que c’était trop dur.»
Arrivée en Suisse
Une année plus tard, alors qu’il convoite des cours de piano, les places en école manquent. Alors il reprend son violon en main et suit les cours de l’école de musique de la Corporación Cultural de Antofagasta. En deux mois, le petit violoniste atteint un niveau de pratique d’une année. Alors qu’il peine encore à écrire, il converse avec les notes sans difficulté. Jusqu’à ses huit ans, Juan José n’entend aucun autre genre musical que du classique. Un amour qui lui vient de ses parents. Encore aujourd’hui, le classique reste pour lui le plus haut niveau d’art musical. Scolarisé à la maison, ses journées sont alors consacrées à la pratique du violon. Pour son premier concert, après un an de cours, il joue le Concerto pour violon n°1 en la mineur d’Accolay, «une pièce qu’un violoniste joue habituellement après 4 ans de travail». À huit ans, il est déjà sur les bancs du conservatoire de l’Universidad Mayor de Santiago, qui, sous la direction du professeur et violoniste français Dorian Lamotte, fait une exception en l’acceptant dans son programme. Il s’assied aux côtés d’étudiants âgés de 17 ans et plus.
Puis la famille déménage en Suisse, à Château-d’Œx, où elle réside toujours. Juan José a alors neuf ans. Il intègre l’International Music Menuhin Academy (IMMA) à Rolle, un institut destiné normalement à de jeunes professionnels. Des heures de route par semaine. Ses parents ne comptent pas le temps qu’ils consacrent à la carrière de leur fils. Son père est indépendant et sa mère exerce des emplois en fonction du planning de Juan José. «C’est la seule manière d’être capables d’accompagner notre fils pour qu’il puisse bénéficier des meilleures options possibles.»
Mais la carrière musicale d’un virtuose a un coût. Peu de temps après son arrivée en Suisse, un mécène prend le jeune prodige sous son aile. Bien entouré, Juan José est accompagné musicalement par de grands noms du classique; Eduard Wulfson, professeur de renommée mondiale, Pavel Vernikov, entre autres directeur artistique de la manifestation de musique classique Sion Festival, et Svetlana Makarova, sa professeure actuelle à la Haute École de Musique de Lausanne (HEMU).Son premier concert en tant que soliste, il l’effectue à 10 ans au Victoria Hall de Genève lors d’un récital en faveur des droits de l’enfant. Aujourd’hui, il a déjà joué dans six pays, est régulièrement invité par des festivals en Suisse et a remporté de nombreux concours.
Un bachelor et une maturité fédérale à 16 ans
C’est sur la recommandation de ses mentors que Juan José rejoint le Conservatoire de Lausanne, à l’âge de 11 ans. Deux ans plus tard, il intègre la HEMU en année préparatoire. Encore une exception, au vu de son jeune âge. En 2026, il obtiendra son bachelor en violon, sous condition d’avoir obtenu une maturité fédérale ou un titre équivalent. Grâce à ses cours en ligne condensés, il l’obtiendra à l’âge où les autres adolescents finissent l’école secondaire.
Mais le jeune musicien a tout de même suivi trois années d’école – de la 6P à la 8P - dans le cursus scolaire traditionnel. Avant que cela ne devienne trop dur. «Quand j’ai commencé la 8P, j’entrais en pré-HEM, c’était trop intense. Après l’école, je devais aller à Lausanne, faire mes devoirs, préparer mes cours de violon. J’arrivais chez moi à minuit, j’étais très souvent malade. Mais grâce à cela, j’ai pu m’adapter à la culture suisse et mieux apprendre le français.»
Des ambitions sans limites
Et puis, il y a trois ans, Juan José commence le piano au Conservatoire, tel qu’il le souhaitait depuis petit, avec le professeur Jorge Viladoms. Son objectif: obtenir un bachelor dans cet instrument et faire une deuxième carrière, en tant que pianiste soliste. Son rêve ultime? Devenir chef d’orchestre. Il réfléchit encore au meilleur endroit où effectuer ce master.
Lorsqu’il ne joue pas de violon ou de piano, Juan José apprécie la nature et le sport, particulièrement le ski. «En tant que violoniste, le ski est très risqué, même interdit, dit-il. J’ai appris lors de mes années d’école ici, nous en faisions beaucoup. Alors, en hiver, quand je peux, je fais du ski l’après-midi après une matinée de violon.» Pour gérer le stress de cette vie à cent à l’heure, Juan José médite beaucoup, une habitude familiale transmise par ses parents. La musique, ce n’est pas que de la joie; les heures passées à répéter peuvent être frustrantes et ennuyantes. «Grâce à la musique, j’arrive à mieux comprendre ce que je vis et qui je suis. J’entends des solutions dans la musique. C’est un autre langage, plus universel, qui peut exprimer ce que des paroles ne peuvent pas. Et puis j’aime aussi la partager, car si cela m’aide, cela peut aider d’autres gens.»