A Lausanne, un quartier se mobilise contre la suppression de 77 places de parc

Rédigé par
Fabio Bonavita
Lausanne

PAVEMENT • En moins de trois semaines, une pétition lancée par un habitant de la rue du Pavement a recueilli plus de 400 signatures. Elle dénonce une mesure inadaptée dans un quartier qui compte notamment un EMS et une garderie. La Ville ne compte pas revenir sur sa décision.     
Lausanne: capitale olympique, capitale du crack et depuis plusieurs années capitale de la suppression des places de parc. Pour s’en convaincre, il suffit de jeter un œil aux chiffres officiels. Entre 2018 et fin 2023, le chef-lieu vaudois a perdu plus de 2700 places bleues gratuites et ce chiffre continue d’augmenter mois après mois. Au grand dam de certains habitants contraints de s’improviser pétitionnaires pour faire entendre leur mécontentement. 
C’est le cas de Didier Mermoud qui vit depuis plus de 40 ans à la route du Pavement: «En juin, la Ville a supprimé une septantaine de places bleues dans le quartier pour y faire des zones de rencontre avec des bancs et des arbres, c’est totalement absurde puisque nous sommes déjà entourés par les parcs de la Rouvraie, de l’Hermitage et de Sauvabelin. Je n’ai pas voulu rester les bras croisés donc j’ai lancé une pétition pour que la Municipalité revienne sur sa décision. En seulement trois semaines, en plein été, j’ai déjà recueilli plus de 400 signatures de personnes mécontentes, cela ne m’étonne pas. En effet, ce quartier n’est pas adapté à l’exclusive mobilité douce, il y a un EMS et une garderie donc les gens qui viennent visiter leurs proches ou récupérer leurs enfants ont souvent besoin de leur voiture. Et vu qu’il n’y a presque plus de places, ils tournent des heures dans le quartier ou squattent les places dévolues aux habitants, cela devient infernal.»   
Véhicules d’urgence empêchés
Sans être aussi alarmiste, Christophe Blanc, directeur hôtellerie et logistique au sein de la Fondation Bois-Gentil qui gère l’EMS de Sauvabelin, confirme avoir déjà reçu des plaintes de familles venues visiter un proche. Ce qui ne l’a pas vraiment surpris: «Il était déjà difficile de se parquer avant la suppression de ces places. La moyenne d’âge de nos résidents augmente et de facto celle de leurs proches qui ont, dès lors, aussi des difficultés de mobilité. De plus, les visiteurs ont de plus en plus tendance à se parquer sur nos places réservées aux véhicules d’urgences.» Même son de cloche à la garderie Bois-Gentil où sa directrice, Marie-Jo Marendaz, rappelle que certains parents n’ont pas d’autre choix que d’utiliser leur voiture, avec les complications que cela comporte: «La garderie ne dispose pas de place de parc dépose-enfant ou de place visiteurs, les parents doivent donc chercher une place dans le quartier et nous disent ne plus en trouver du tout depuis la suppression des places en zone bleue qui se trouvaient en face de la garderie.»   
Un restaurateur en difficulté
A quelques centaines de mètres de là, c’est un autre homme dépité qui constate l’évolution de son quartier. David Balado, patron du restaurant La Forêt, a vu son chiffre d’affaires fondre d’environ 30% depuis le début de l’été. Et cela n’est pas dû aux départs en vacances: «Tous les jours, des gens m’appellent pour annuler leur réservation car ils ne trouvent pas de places de parc. Les seuls clients qu’il nous reste sont ceux qui viennent à pied, les autres vont ailleurs et je les comprends. Nous avons signé la pétition car nous sommes dans une situation financière très compliquée. J’ai tenté de lancer un service de livraison, mais c’est très difficile, la concurrence est rude.» 
Relais politique
Face au désarroi qui anime certains habitants et commerçants de la rue du Pavement, Mathilde Maillard, la présidente de la section lausannoise du PLR, a décidé de relayer politiquement leurs doléances: «Mon parti, le PLR Lausanne, donnera de l’écho à leur pétition dont le succès démontre que des améliorations doivent être apportées par la Municipalité. Cette dernière ne peut faire la sourde oreille lorsque tout un quartier se mobilise. Une fois encore, tous les citoyens ne peuvent se déplacer en transports publics ou à vélo, il faut que la réalité des habitants prime sur le dogmatisme.» Un dogmatisme que Florence Germond, municipale en charge de la mobilité, réfute en bloc. Au contraire, l’élue estime que les aménagements, visant à la création d’une zone modérée, contribuent à diminuer la pollution et le bruit dans le quartier et à augmenter le confort et la sécurité des chemins et traversées piétonnes. «Ce projet a vu la transformation de 77 places de parc voiture en zones de verdure et d’aménagements pour la mobilité active. Toutefois, il existe encore 850 places de parc dans le quartier dont une centaine est publique.» Quid des visiteurs de l’EMS? «L’EMS de Bois-Gentil est desservi par la ligne de bus n°16, arrêt Hermitage situé à 200 mètres de l’EMS et par les lignes n° 3, 8, 18, 23, arrêt Motte situé à 250 mètres. Les visiteurs qui se déplacent à vélo voient leur confort et sécurité améliorée avec les nouveaux aménagements qui comprennent l’augmentation du nombre de places de stationnement. Il reste plus de 60 places de stationnement pour voitures sur la route du Pavement, entre la route du Signal et l’avenue d’Aoste, dont une vingtaine sont situées à moins de 100 mètres de l’EMS. Le parking du Signal qui se trouve à 15 min à pied comprend 105 places bleues, disponibles également aux macarons K.» 
Et malgré l’évident succès de la pétition lancée par Didier Mermoud, la municipale ne compte pas faire marche arrière: «Ce projet de zone modérée répond à des demandes émanant des habitants. Sa mise à l’enquête n’a rencontré aucune opposition.» Pour ce qui est de sa concrétisation, par contre, c’est une autre histoire…

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