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Inégalités de fortune: le compte est-il bon?

Rédigé par
economiesuisse
Société

RICHESSES - Ce qui est peut-être vrai pour les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne à propos de la fortune et des inégalités, l’est-il aussi pour la Suisse ? 

Les médias reparlent des inégalités de fortune en Suisse. Le Temps a mentionné récemment une étude qui affirme que ces inégalités sont en hausse en Suisse, et qu’elles seraient même plus fortes qu’aux Etats-Unis. Au Parlement, les défenseurs d’une initiative déposée par les Jeunes socialistes s’appuient sur ces affirmations pour réclamer un très lourd impôt sur les successions importantes.

Ce discours général est volontiers tenu pour vrai. Divers économistes, comme le Français Thomas Piketty, dénoncent depuis plusieurs années une évolution mondiale qui irait dans ce sens. Mais ce qui est peut-être vrai (les travaux de Piketty sont contestés par certains) pour les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne, l’est-il aussi pour la Suisse? 

Tenir compte de la prévoyance

Les statistiques mondiales portant sur la fortune se basent sur la fortune imposable. Or la Suisse a développé la prévoyance professionnelle, qui n’est justement pas imposable pendant la vie active. Le 2e pilier contient globalement 1200 milliards de francs qui n’apparaissent pas sur les déclarations d’impôt. Et pour de nombreux travailleurs, c’est leur plus grande fortune. Si l’on tient compte de cette richesse différée, l’image des inégalités est différente. Les plus riches ne détiennent pas 40% de la fortune totale, comme on l’entend souvent dire, mais moins de 30%. 

Les plus riches ne détiennent pas 40% de la fortune totale, comme on l’entend souvent dire, mais moins de 30%. 

Il y a un autre aspect, pas du tout statistique, qui incite à penser que les inégalités de fortune ne sont pas forcément un vrai problème. Pour le comprendre, posons une hypothèse audacieuse : Jeff Bezos, Elon Musk et Bernard Arnaud décident de s’établir en Suisse. A part des manifestations dans les rues de gens qui ne veulent pas du patron de Tesla en Suisse, que se passerait-il ? Et bien, mécaniquement, les inégalités de fortune exploseraient, car ce sont les trois hommes les plus riches du monde. Malgré cela, est-ce que ce serait-ce négatif pour les autres citoyens ? Certainement pas. Au contraire, ces milliardaires feraient le bonheur des cantons et communes où ils s’établiraient, en payant de lourds impôts sur leurs revenus et, surtout, sur leur fortune. 

En fait,  l’analyse des inégalités est plus intéressante si elle porte sur la distribution des revenus. La bonne nouvelle : dans ce domaine, la Suisse s’affiche comme l’un des pays les moins inégaux du monde, un fait confirmé par Thomas Piketty lui-même.

Risque...

Alors certes, tout n’est pas rose pour autant. Mais crier « haro sur les riches » n’est pas la bonne réponse, car ils paient leur part :  notre système fiscal, basé sur une imposition progressive, fait en sorte qu’ils contribuent plus que proportionnellement aux impôts sur le revenu et la fortune. Ainsi, 5% des plus aisés s’acquittent de 90% de l’impôt sur fortune (soit plus de 8 milliards), et 1% d’entre eux paie plus de 40% de l’impôt fédéral direct (soit plus de 6 milliards). Alourdir encore leurs impôts, surtout dans des cantons déjà chers comme ceux de Genève et Vaud, c’est prendre le risque de les voir partir sous d’autres cieux. 

 

Vincent Simon
Responsable de projets Finances et fiscalité

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