Bras de fer entre les clubs d’aviron et la Municipalité

Rédigé par
Charaf Abdessemed
Lausanne

ÎLE AUX OISEAUX • Opposition, pétition, les clubs d’aviron de Lausanne sont vent debout contre le projet d’édification d’une île aux oiseaux au large de la Chamberonne. Celle-ci aurait un impact très négatif sur leur activité sportive.

Alors que la mise à l’enquête s’est achevée le 19 décembre dernier, les oppositions au projet Chamberonne qui comprend la renaturation de l’embouchure de la Chamberonne, une gestion des crues améliorée avec la galerie de Broye et la création d’une île aux oiseaux, baptisée «Leusonna», devant le fameux Parc Bourget, commencent à fleurir. 
Parmi celles-ci, une revêt une saveur  toute particulière, celle du club Lausanne-Sports Aviron. «Nous faisons opposition pour avoir les moyens légaux d’être entendus, car on ne l’a pas été par la Municipalité de Lausanne depuis des années malgré toutes nos démarches, déplore son président Romain Loup, qui annonce également le lancement d’une pétition dès ce mois de janvier. Nous retirerons notre opposition dès lors que la situation évoluera dans le bon sens». 
Une menace quasiment existentielle
Pour les clubs d’aviron lausannois, le Lausanne-Sports et le Rowing Club, l’édification d’une île aux oiseaux impacterait leurs activités de manière quasiment existentielle. «Actuellement pour nos entraînements, nous ramons environ quatre à cinq minutes, puis il nous faut selon la taille du bateau, 45 secondes à deux minutes pour tourner. Avec l’île aux oiseaux, dont nous ne récusons pas du tout le bien-fondé, nous ne pourrons ramer que deux minutes au maximum et c’est vraiment problématique», détaille le président du Lausanne-Sports Aviron, qui ajoute: «Je rappelle que chacun de nos deux clubs compte environ 400 membres et que nous portons haut les couleurs du sport suisse en envoyant régulièrement des athlètes aussi bien aux Jeux olympiques qu’aux Championnats du monde». 
Adaptation du projet attendue
L’emplacement de l’île aux oiseaux, dont l’objectif est de reconstituer des milieux naturels disparus lors de la construction des aménagements des berges au cours du XXe siècle, n’a pourtant pas été choisi par hasard, tenant compte de multiples contraintes liées aux possibilités d’implantation dans la baie de Vidy: profondeur pour éviter les risques d’affaissement, distance minimale du rivage, présence de conduites sous-lacustres, comme le gazoduct de Gaznat et l’exutoire de la STEP, etc. Autant dire que trouver une solution alternative qui réponde à l’ensemble des critères tout en satisfaisant les acteurs sportifs relève de la gageure. Le municipal Pierre-Antoine Hildbrand, se montre pourtant plutôt confiant: «Selon les discussions que nous avons eues avec les clubs, leur opposition sera «constructive» dans l’attente d’une adaptation du projet favorable et équilibrée. Des solutions se dessinent et je suis confiant tant pour la pratique de l’aviron à tous les niveaux que pour Leusonna».
Déplacement du côté  de Saint-Sulpice?
Parmi celles-ci, la définition de règles d’utilisation et des nouvelles lignes de navigation qui puissent convenir à la fois aux distances nécessaires aux sportifs et aux multiples objectifs de renaturation dans le secteur. 
«Pour nous, le scénario idéal, ce serait plutôt que l’on déplace l’île à côté de la Chamberonne mais du côté de Saint-Sulpice», lance de son côté Romain Loup, du Lausanne-Sports Aviron. 
Une option que le municipal Hildbrand n’écarte pas, mais qui implique une consultation entre le Canton et l’Université. Quant au syndic de Saint-Sulpice, il ne nous a malheureusement pas été possible de le contacter, en dépit de nos multiples tentatives.

Le WWF et Pro Natura  s’opposent également

S’il se «réjouit» de voir la renaturation de l’embouchure de la Chamberonne inclure la création de l’île aux oiseaux de Leusonna, le WWF Vaud estime que le Canton «peut mieux faire». Au point, en association avec Pro Natura, de déposer une opposition au projet. «Le projet de renaturation de l’embouchure de la Chamberonne reste limité, avec seulement 400 mètres consacrés à des objectifs biologiques. Il répond plus à des enjeux hydrauliques qu’environnementaux, déplore l’organisation dans un communiqué. La galerie de Broye prévue, longue de 1,9 km, aura un impact sur les cours d’eau de la région, notamment la Mèbre. Il reste une belle opportunité de mieux valoriser ce projet en renforçant les efforts de renaturation pour les cours d’eau touchés». 

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