OLIVIER FELLER, CONSEILLER NATIONAL PLR
Lausanne Cités: Quelle est, à vos yeux, la principale raison pour pousser le peuple à rejeter ce projet?
Olivier Feller: Avec ce projet, il n’y a que des perdants. Les retraités actuels n’obtiendront rien de plus même s’ils vivent modestement. Les femmes devront travailler une année supplémentaire. Les employés verront leur salaire disponible diminuer. Et les consommateurs paieront plus de TVA.
Vous prétendez même que la réforme, au lieu de la sauver, menace la prévoyance vieillesse. En quoi?
C’est un fait. Depuis trois ans, l’AVS dépense davantage qu’elle n’encaisse. Le déficit s’est élevé à 320 millions en 2014, à 579 millions en 2015, puis à 767 millions en 2016. Et la situation va continuer de s’aggraver. Dans ces conditions, il est insensé d’augmenter encore les dépenses en versant de façon généralisée 70 francs de plus par mois à tous les futurs retraités. Car cette mesure coûtera à l’AVS 1.4 milliard de plus en 2030 et 2 milliards de plus en 2035.
Les partisans estiment pourtant que le projet évitera que l’AVS subisse des déficits pendant la prochaine décennie et que les recettes supplémentaires assureront son avenir.
Je pourrais admettre les nouvelles recettes si elles permettaient d’assurer durablement l’équilibre financier de l’AVS. Mais comme le projet prévoit simultanément une hausse des dépenses, il maintient l’AVS dans une logique déficitaire. Franchement, est-ce vraiment un progrès social de faire payer davantage les travailleurs et les contribuables pour se retrouver dans moins de dix ans avec une AVS à nouveau gravement déficitaire?
Pour pousser à voter non, vous affirmez que le projet désavantage les retraités actuels dans le besoin. N’est-ce pas un argument de gauche?
Non, c’est un constat. Dans quelques années, des retraités âgés par exemple de 75 ans auront 70 francs de rente AVS de moins par mois que des retraités de 74 ou de 73 ans. Cela deviendra incompréhensible, ce sera une inégalité crasse.
La réforme adapte pourtant aux réalités du travail une prévoyance vieillesse qui n’a pas été revue depuis 20 ans.
La réforme va surtout aggraver à moyen terme le déséquilibre financier de l’AVS. Au point que certains exigeront une hausse de l’âge de la retraite à 67 ans. Ce n’est pas ce que je veux.
Les rendements du 2e pilier sont à la peine. N’est-il pas temps de réformer le système?
Le projet prévoit une baisse des rentes du 2e pilier obligatoire de 12%. Certains assureurs y voient un avantage et soutiennent le projet. Mais c’est manquer de vision globale des assurances sociales. La dette de l’assurance invalidité s’élève à 11 milliards, celle de l’assurance-chômage à 3 milliards. Et les réserves de l’assurance perte de gain ne cessent de diminuer. Dans ce contexte, il ne faut pas augmenter les dépenses de l’AVS mais garantir durablement le niveau actuel des rentes.
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