Climat: pourquoi (presque) tout le monde s’en fout!

Il y a une semaine, les jeunes de 1325 villes, dans 98 pays, ont déserté les salles de classe pour protester contre l’inaction des adultes et faire baisser la fièvre dont souffre la terre.

Dans le canton de Vaud, comme ailleurs, la politique menée ne semble pas vraiment en tenir compte.

Comment expliquer ce décalage? Les lobbys économiques sont pointés du doigt.

  • Faute d’avoir su la protéger, la terre est-elle en train d’aller à sa perte? 1,2,3 RF

    Faute d’avoir su la protéger, la terre est-elle en train d’aller à sa perte? 1,2,3 RF

«Notre pire ennemi est le fatalisme»

Adèle Thorens Goumaz, conseillère nationale écologiste

«Les jeunes souhaitent que l’Etat agisse»

Marine Decrey, présidente de Swiss Youth for Climate

Le vendredi 15 mars dernier, ils étaient des millions à travers la planète pour protester contre l’inaction des gouvernements face au réchauffement climatique. Des millions de jeunes à avoir répondu à l’appel lancé par une autre jeune, la Suédoise Greta Thunberg, qui manifeste depuis des mois chaque vendredi pour le climat. Une démarche inédite, comme celle qui s’est aussi déroulée de manière similaire à la mi-janvier à Lausanne où des centaines de lycéens avaient battu le le bitume pour défendre la même cause.

Cette déferlante est prise au sérieux certains milieux politiques estimant que le Canton en fait assez, d’autres... pas assez! Ainsi pour Adèle Thorens Goumaz, conseillère nationale et vice-présidente du groupe parlementaire des Verts, l’urgence est évidente: «Les mentalités évoluent déjà et la nouvelle génération ne nous laissera pas détruire son avenir. Notre pire ennemi est le fatalisme: tout est encore possible et les solutions sont là! Le rôle des collectivités publiques est de rendre ces solutions accessibles à l’ensemble de la population et des entreprises et d’en encourager clairement l’usage, face aux technologies et aux pratiques polluantes et dépassées.» Christelle Luisier Brodard, députée PLR vaudoise, nuance: «Tout le monde souhaite la promotion des énergies renouvelables, mais pas forcément à côté de chez lui. Il en va ainsi du dossier des éoliennes. Sur le principe, tous les citoyens comprennent le principe du pollueur-payeur, mais en pratique cela crée des controverses.» Et d’ajouter: «Toujours concernant les coûts, le consommateur souhaite une énergie propre, mais pas forcément avec une augmentation du prix final. Les équilibres sont dès lors délicats à trouver.»

Fossé générationnel

Reste que malgré les oppositions politico-politiciennes, la question du climat pousse les jeunes à manifester. Faut-il y voir un fossé générationnel? Marine Decrey, présidente de l’association Swiss Youth for Climate, en est convaincue: «Les jeunes souhaitent que l’Etat agisse. Or, la moyenne d’âge de nos politiciens se situe autour de 50 ans et ne représente donc pas ou peu les intérêts des nouvelles générations.»

Consciente du chemin à parcourir pour faire bouger les lignes, Yvonne Winteler, présidente de l’association Climat Genève, ne baisse pas les bras pour autant: «De plus en plus de citoyens sont convaincus qu’il faut changer nos modes de vie et les règles du jeu économique pour répondre à la crise climatique. En témoigne le nombre croissant de personnes qui participent aux marches pour le climat.» Avant d’avancer des solutions: «Il faut renoncer au développement de l’aéroport, arrêter les développements du réseau routier (traversée de la rade, troisième voie sur l’autoroute) pour investir dans les transports publics du canton et enfin introduire des taxes sur les modes de transports particulièrement polluants pour financer les mesures du plan climat.»

Des solutions concrètes

Pour Christelle Luisier Brodard, des changements de comportement sont immédiatement possibles: «Il faut renforcer les incitations à l’isolation des bâtiments, en sachant que le chauffage des bâtiments représente environ un tiers de notre consommation d’énergie finale. En outre, avec la nouvelle loi sur l’énergie vaudoise, les communes doivent se doter d’une planification énergétique territoriale. Il s’agit pour le canton d’accompagner ces planifications, de soutenir les communes et surtout de leur donner les outils pour agir à leur niveau sur le plan énergétique. Car les communes sont en connexion directe avec la population et sont à même de convaincre, ce qui est un élément clé pour éviter les blocages, pour trouver des solutions de proximité.» Adèle Thorens Goumaz va encore plus loin: «Le canton pourrait par exemple exiger des caisses de pensions de ses collaborateurs, ainsi que de la banque cantonale qu’ils cessent d’investir dans les énergies fossiles. Mais aussi investir davantage dans l’assainissement énergétique des bâtiments. Il pourrait, en plus du développement des transports public et de la mobilité douce, encourager le car-sharing, inciter les collectivités et les entreprises à favoriser le télétravail et assurer une meilleure infrastructure de recharge pour les voitures électriques. Enfin, il pourrait inclure le respect du climat dans le choix des menus servis dans des établissements publics.»

Et Marine Decrey de conclure: «Le monde économique va devoir s’adapter car la planète ne peut s’adapter à nos modes de consommation.»