Souvenirs de Lausanne: La Mercerie (1/2)

Baby-boomer née à Lausanne, Carmen Etter vous fait découvrir le quartier où elle a grandi...

Mes parents, mes deux sœurs et moi habitions au numéro 5. L’appartement donnait sur la Mercerie et la rue Pierre Viret. Depuis ma chambre et la cuisine, on avait la chance de contempler la Cathédrale. Depuis tout en haut, en descendant par la droite, jusqu’à la place de la Palud, le premier magasin était le stoppage artistique: à travers la vitrine, on pouvait observer deux ouvrières qui tiraient des fils dans un ourlet de pantalon pour reconstituer le tissu brûlé par une cigarette ou autre dégât. C’était vraiment de l’art.

Un peu plus loin, un relieur que l’on avait surnommé «Jésus-Christ», portait un grand vêtement en jute, des sandales et affichait une grande barbe! Le mercredi après-midi, je poussais la porte de son atelier qui sentait le cuir et la colle. J’attendais qu’il coupe des feuilles de papier au massicot et je récoltais quelques bouts de papier pour dessiner. En dessous, les jouets Weber, que l’on admirait à travers les vitres et où on regardait longtemps tourner les trains électriques...

Les bruits de Monsieur Rigaldo

En se laissant glisser, on arrivait à la boutique tenue par la mère et la fille: «Les remailleuses». Eh oui, à l’époque, les dames portaient des bas de soie et, lorsqu’une ou deux mailles filaient, hop chez ces artistes qui, avec un crochet électrique, accomplissaient un miracle. En continuant, un bruit régulier rythmait le quartier: Monsieur Rigaldo, installé sur le trottoir, martelait ses chaudrons en cuivre pour faire de jolis dessins sur tous les objets de sa création.

Juste après, un magasin de tabac-journaux que nos parents n’appréciaient guère et pour cause: la patronne vendait des cigarettes à la pièce. En tant qu’adolescentes, on a bien sûr toutes essayé une fois!