Vladimir Nabokov, écrivain, 1899-1977. Les lettres d’or s’étalent sur la lourde et imposante dalle de marbre noir sous laquelle repose celui qui fut romancier, nouvelliste, poète, mais aussi traducteur et critique littéraire. En dessous, deux autres noms, ceux de Vera, son épouse, et de Dimitri, son fils. Une famille, enterrée côte-à-côte, dans la troisième allée du petit cimetière de Clarens. Avec vue sur le lac, à deux pas du centre de Montreux et de son agitation estivale bienveillante.
Sur les chemins de l’exil
Pourquoi le célèbre auteur, entre autres, du sulfureux «Lolita», qui occupe une place unique dans l’histoire de la littérature du XXe siècle, a-t-il été enterré en ces lieux, si loin de sa Russie natale? De fait, c’est en 1961, six ans après la parution de «Lolita» qui lui a rapporté beaucoup d’argent, que Vladimir Nabokov quitte Paris avec son épouse et s’installe sur la Riviera vaudoise. Plus exactement dans la suite numéro 60, au 6e étage du Montreux Palace, qui offre au couple le calme, la discrétion et le confort dont il a besoin.
Une oasis de plus pour cet homme passionné par les papillons et les échecs qui a été durant toute sa vie un exilé, ballotté par les vicissitudes de l’Histoire qui l’ont conduit successivement en France, au Royaume-Uni, puis aux États-Unis, à partir de 1940. C’est là qu’il connaîtra le succès international avec Lolita, qui lui valut du reste les foudres de la censure américaine, avant son adaptation au cinéma par Stanley Kubrick en 1962. Avant de revenir en Europe et, finalement, de prendre ses ultimes quartiers à Montreux.
Deux chutes prémonitoires
Dans cette suite du Palace, il vivra durant seize ans et va y écrire une rafale de chefs-d’œuvre. Durant une de ses fameuses chasses aux papillons, en juillet 1975, Nabokov chute sur des rochers en montagne. Un an plus tard, c’est dans sa salle de bains que son crâne percute violemment le sol. Il ne se remettra jamais vraiment de ces deux accidents. Il s’éteint le 2 juillet 1977. Dans «Autres rivages», son autobiographie, il avait écrit: «Notre existence n’est que la brève lumière d’une fente entre deux éternités de ténèbres»
