Alessia, Livia, Irina et… Matthias, chronique d'un cauchemar ultime

FAITS DIVERS DE L'ETE • Cet été, nous revenons chaque semaine sur un fait divers lémanique ayant marqué les Romands. Aujourd’hui, souvenons-nous des petites «jumelles disparues» de Saint-Sulpice.

Alessia et Livia… Leurs doux prénoms évoquent encore pour tout parent le cauchemar ultime. Presque personne n’a oublié ces «jumelles disparues» enlevées par leur père à la dérive un funeste 30 janvier 2011. Matthias gardait ses fillettes de 6 ans ce fameux week-end.

Ce dimanche soir, cet ingénieur suisso-canadien de 43 ans travaillant chez Philip Morris n’avait pas ramené les enfants comme prévu à sa femme Irina, dont il était en instance de divorce.

Cinq jours d’errance vers la mort

Cinq jours plus tard, après avoir traversé la France, la Corse et l’Italie au volant de son break Audi A6 noir, l’expat se jetait sous un train en gare de Cerignola dans les Pouilles.

Les restes de son GPS, que ce solide gaillard au fort strabisme avait sur lui lors de l’impact, ne permettront malheureusement jamais aux enquêteurs de reconstituer avec précision son itinéraire. Dans les jours suivants son geste fou, huit lettres de sa main arrivaient dans la boîte à lettre de son ancienne compagne Irina à Saint-Sulpice. A l’intérieur: 88 coupures de 50 euros que la mère des disparues espérait avoir été utilisées par son ex-compagnon pour confier leurs jumelles à une tierce personne. Mais dans la dernière enveloppe, ce message lapidaire devenu réalité depuis: «Elles reposent en paix. Elles n’ont pas souffert. Tu ne les reverras plus.»

L’affaire avaient fait les gros titres des mois durant et passionné le grand public. Au début de l’affaire, la famille des disparues avait reproché à la police cantonale vaudoise d’avoir trop tardé à se mettre en chasse du fugitif. L’errance de Matthias avait duré cinq longs jours entre la Suisse, Marseille, Propriano, Bastia, Toulon et Cerignola.

De rares images de lui, retirant de l’argent dans un bancomat ou passant à un péage d’autoroute, le montrent toujours seul. Ses fillettes ont été aperçues à Genève, sur le ferry ou en Corse par des témoins plus ou moins crédibles. «Matthias était désespéré depuis sa séparation, avait expliqué sa sœur à la presse peu après le drame. Il craignait qu’Irina ne déménage à Bruxelles avec ses filles, où une belle place de travail lui était proposée.»

Rebondissement peu crédible

Notons qu’à l’époque, Irina officiait en qualité de juriste chez Philip Morris à Lausanne. L’affaire avait débouché sur la création par l’Italienne de Missing Children, une fondation de recherche des enfants disparus toujours active. A ce jour, on ne sait toujours pas ce que sont devenues ses filles. Leurs corps sont-ils enterrés dans une forêt romande? Reposent-elles au fond du Léman ou de la Méditerranée comme pourraient le laisser penser la mystérieuse disparition de deux grands sacs de plongée au domicile du fugitif? Ou bien même, comme l’espèrent encore certains, sont-elles vivantes on ne sait trop où? A part Matthias, qui a emmené la réponse dans sa tombe, personne vraisemblablement ne le sait. En mars dernier, un obscur magazine américain affirmait que Julia, une jeune Polonaise qui s’était fait connaître en disant être la petite Britannique Maddie McCann, disparue le 3 mai 2007 à Praia da Luz, au Portugal, pourrait en réalité être Livia. Elle aurait été contactée par la famille de Livia et Alessia pour vérification génétique.

Et ce même mois à Yverdon, l’assassinat par un père en instance de divorce de sa femme et de leur trois filles de 5, 9 et 13 ans faisaient remonter à la surface le mystère d’Alessia et Livia et la question qui le sous-tend: comment un papa, fut-il aveuglé par la souffrance d’une séparation conflictuelle, peut-il en arriver à tuer ses enfants adorés par vengeance?

www.missingchildren.ch