Beau projet, l’épicerie solidaire reste un défi

FAVERGES • Pour l’aide alimentaire liée à la crise du coronavirus, la Maison de Quartier des Faverges a opté pour une épicerie solidaire, qu’elle souhaite par ailleurs pérenniser. S’il s’agit d’un précieux soutien pour les bénéficiaires, le projet, lui, ne va pas sans difficultés. Reportage.

  • Une partie de l’équipe de la Maison de Quartier des Faverges: (de g. à d.) Erika Arietta, Sandra Segovia, Luis Ludena et Eloïse Chamot. MISSON

    Une partie de l’équipe de la Maison de Quartier des Faverges: (de g. à d.) Erika Arietta, Sandra Segovia, Luis Ludena et Eloïse Chamot. MISSON

  • Les animatrices Erika Arietta et Sandra Segovia placent les aliments dans les caisses. MISSON

    Les animatrices Erika Arietta et Sandra Segovia placent les aliments dans les caisses. MISSON

Mardi, 16 heures. Quelques personnes éparses arrivent à la Maison de Quartier des Faverges, pour y déposer quelques produits alimentaires. Pour la troisième semaine consécutive, les animateurs sont sur place entre 16 heures et 19 heures le mardi et le mercredi pour faire tourner l’épicerie solidaire qu’ils ont mis en place. Une épicerie solidaire? Un lieu où la nourriture, distribuée gratuitement, est, en théorie, achetée et amenée par des citoyens désireux d’aider.

Une solidarité essentielle

Si la Maison de Quartier reçoit également chaque semaine des produits frais de Table Suisse, qui complète leur stock, l’équipe en charge du lieu a souhaité développer un concept différent à la distribution de sacs préparés: «Nous trouvions important que les gens puissent choisir leurs produits. Et ce principe de solidarité entre ceux qui veulent aider et ceux qui sont dans le besoin, est essentiel», indique la responsable du lieu Genette Lasserre.

Cependant, moins de 10 Lausannois sont venus apporter des denrées ce mardi. «C’est un défi, car nous avons plus de demandeurs que de personnes qui apportent des produits, ou effectuent des dons», explique l’animatrice Erika Arietta. Agatha, étudiante, dépose pour la première fois un sac de nourriture: «Avec mes parents, nous nous sommes dit que si nous pouvions nous montrer solidaires de cette manière, il fallait le faire.»

Changement de programme

Mercredi, 15h30. L’ambiance est tout autre: une file d’adultes attend devant l’entrée. C’est le jour de la distribution. Alors que l’épicerie est censée ouvrir à 16 heures, «la première famille est arrivée à 15 heures», rapporte l’animatrice Sandra Segovia.

Même si son sourire, caché par son masque, ne la quitte pas souvent, Sandra Segovia est d’humeur mitigée: «Comme nous n’avions clairement pas assez de nourriture, nous avons changé le système et préparé des sacs, pour que chacun puisse recevoir équitablement», explique-t-elle, sans cacher sa déception. Car des sacs préparés, ce n’était pas le projet rêvé de l’animatrice. Mais la semaine précédente, l’épicerie était vide une heure après l’ouverture, et beaucoup n’ont presque rien eu. Quant à savoir comment cela se passera la semaine suivante, tout dépendra de la quantité de nourriture que l’équipe d’animation réussira à récolter, ou à acheter. Car, pour compléter les stocks, les animateurs vont eux-mêmes faire les courses, très souvent à compte personnel.

Une aide précieuse

«Cela fait mal au cœur, car le nombre d’habitants venant s’approvisionner augmente mais pas les produits», déplore Erika Alcivar, monitrice. Dans la file d’attente, Emilie*, bientôt maman d’un deuxième enfant, vient depuis le début. «Je suis serveuse. Pendant la fermeture j’ai bénéficié des RHT, mais avec la réouverture, mon revenu a été diminué, et je n’ai pas repris. Je reçois 480 francs par mois. Alors ces distributions nous aident beaucoup!» Aujourd’hui, 43 personnes se sont déplacées pour recevoir de la nourriture. C’est huit de plus que la semaine précédente. Et exactement le nombre de sacs préparés par l’équipe. Santiago Diaz, étudiant et employé par la Maison de quartier, sourit: «Un miracle!»

*Prénom d’emprunt