«Sur les routes et les trottoirs lausannois, c’est la guerre!»

MOBILITE • Conseillère communale et nouvelle présidente du PLR Lausanne, Mathilde Maillard dézingue la politique de mobilité menée dans la capitale vaudoise. Elle déposera le 8 novembre une interpellation qui questionne les chiffres officiels de la Municipalité.

  • Mathilde Maillard compte marquer de son empreinte sa présidence du PLR Lausanne. VERISSIMO

    Mathilde Maillard compte marquer de son empreinte sa présidence du PLR Lausanne. VERISSIMO

Lausanne Cités: Votre interpellation «Des chiffres sur la mobilité à Lausanne» sera déposée lors du prochain Conseil communal, pourquoi vous emparez-vous de ce sujet?

Mathilde Maillard: J’ai été très étonnée d’apprendre, lorsque j’ai lu les rapports de la Municipalité sur le réaménagement de l’avenue d’Echallens, qu’il n’y avait plus que 4700 voitures qui y passaient par jour alors qu’en 2014, ce chiffre était encore de plus de 10'000 d’après le site du canton de Vaud. Je me suis donc demandé d’où venait ce chiffre car il n’est disponible nulle part.

Vous sous-entendez que les chiffres annoncés par la Ville sont faux?

A l’heure actuelle, je n’ai aucune raison de douter de ce que la Ville publie, mais je souhaiterais comprendre comment ces chiffres sont comptabilisés et quels critères sont pris en compte (Covid, période de travaux, par ex.). Si elle n’a rien à cacher, la Ville pourrait, par exemple, mettre en ligne les résultats de ses comptages. C’est aussi une question de transparence.

Est-ce que cette interpellation n’est pas un prétexte pour déclarer la guerre à la politique de mobilité menée actuellement en Ville de Lausanne?

La guerre existe sur les routes et les trottoirs lausannois! Et c’est la gauche qui doit en prendre l’entière responsabilité car elle oppose en permanence les différents modes de transport, cela doit cesser! Par cette interpellation, je souhaite poursuivre notre engagement pour un centre-ville apaisé, dynamique et attrayant. Pour les habitants avant tout, mais aussi pour ceux venant de l’extérieur, qui participent au développement de notre ville et de nos commerces et qui, depuis plusieurs mois, désertent notre capitale.

Que reprochez-vous concrètement à la Municipalité?

Son manque de vision globale. Elle mène sa politique au jour le jour à coup de petit bouts de pistes cyclables et de suppression de places de stationnement. Résultat? La circulation à Lausanne est invivable. Le PLR défend une vision globale et cohérente qui inclut tous les usagers de la route et nous avons de la peine à nous faire entendre par la majorité.

De nombreux citoyens se plaignent également du comportement de certains cyclistes qui semblent ignorer le code de la route, vous partagez ce constat?

Evidemment, on en voit tous les jours griller les feux rouges ou rouler à pleine vitesse sur les trottoirs. C’est pour cela qu’il est nécessaire d’aménager sur les routes des espaces réservés aux vélos et trottinettes et d’autres aux piétons.

C’est pourtant votre municipal PLR qui est en charge de la sécurité, Pierre-Antoine Hildbrand…

Oui, mais il ne faut pas tout confondre, il n’est pas responsable du chaos sur la route.

Peut-être, mais il pourrait multiplier les contrôles policiers à l’encontre des cyclistes?

Je pense qu’il faudrait surtout leur rappeler les règles basiques de la circulation. Ce ne serait pas un luxe. Nous avons déposé un postulat en ce sens.

Quel retour avez-vous des commerçants quant à la suppression des places de parc?

Ce sont les premières victimes. Lorsqu’on en supprime pour y mettre des terrasses, c’est plutôt une bonne chose. Par contre, si c’est pour faire tourner les voitures dans le quartier, c’est vraiment contre-productif. J’ai souvent entendu des artisans, par exemple menuisiers ou tapissiers, me dire qu’ils devront bientôt fermer boutique. Sans accès à leurs enseignes, les clients se font rares car on ne transporte pas une armoire à pied ou au moyen d’un vélo cargo!

Le PLR genevois va saisir la justice contre les limitations à 30 km/h dans le canton de Genève, vous pourriez lui emboîter le pas?

Fort heureusement, le Conseil d’Etat vaudois ne semble pas vouloir prendre des mesures similaires et la Municipalité lausannoise n’a pas la compétence de généraliser le 30 km/h. Cela étant, nous sommes opposés à la généralisation. Il n’y aurait plus aucune incitation à passer par les axes principaux, ce serait la porte ouverte au trafic de transit dans les quartiers, ce que nous ne voulons pas!

Le PLR Lausanne sera plus offensif sur les questions de mobilité sous votre présidence?

La mobilité est l’une de mes priorités car elle participe au développement de notre ville. Le Plan directeur communal (PDCom) et notre initiative pour un centre-ville apaisé nous donne l’occasion de nous positionner avec force pour que Lausanne retrouve de sa superbe.

Y’en a (toujours) point comme nous, l'éditorial de Fabio Bonavita

C’est vrai, nos sociétés ont tendance à s’hystériser. Il suffit de jeter un œil chez nos voisins de l’Hexagone pour s’en convaincre, pas un jour sans sa polémique nationale. Qu’il s’agisse de faits divers, d’immigration ou de réforme économique, l’heure est au manichéisme médiatique. Le camp du bien d’un côté, celui du mal de l’autre, au milieu des journalistes qui feignent d’arbitrer ce qui s’apparente davantage à un pugilat de cour de récréation qu’à un débat démocratique.

Plus près de chez nous, c’est la mobilité qui met le feu au landerneau politique genevois depuis plusieurs semaines. Avec une conseillère d’Etat en charge de l’économie, Fabienne Fischer, qui s’embourbe dans le dossier Uber à grands coups de rétropédalages et autres tergiversations. Son collègue Serge Dal Busco, en charge des infrastructures, ne fait pas mieux en matière d’apaisement. Il vient de prendre la décision d’instaurer le 30 km/h au centre-ville de Genève, de jour comme de nuit, sur le réseau de quartier, mais aussi sur les axes structurants. Une décision qui a fait bondir le TCS, mais aussi le PLR et l’UDC. Augurant d’interminables procédures judiciaires.

Dans ce contexte explosif, Lausanne et le Canton de Vaud font toujours figure d’exception. On y dénombre quand même quelques coups de gueule, comme celui de la nouvelle présidente du PLR Lausanne (lire en page 5), mais on reste dans la mesure, sans volonté de heurter ou de renverser la table. Sur les bancs du Grand Conseil ou du Conseil communal, le consensus y est toujours roi. La fameuse chanson de Gilles «Y’en a point comme nous» reste donc encore d’actualité, pourvu que cela dure…