Rebecca Balestra: «l’humour est le nouveau porno»

STAND-UP • Formée à la Manufacture de Lausanne, la comédienne Rebecca Balestra crée la surprise de cette rentrée culturelle en proposant un spectacle de stand-up pur, coproduit par l’Arsenic et Boulimie. A découvrir au bar club abc à Lausanne tous les jeudis du 15 septembre au 6 octobre. Interview décalée.

  • SANDRA POINTET

    SANDRA POINTET

Lausanne Cités: Vous faites une remarquable carrière dans le théâtre contemporain, avec notamment des pièces à Vidy, à l’Arsenic, à la Comédie de Genève, ou encore au Poche GVE. Pourquoi, d’un coup, se lancer dans le stand-up?
Rebecca Balestra: C’est une volonté d’écriture. J’ai besoin de l’écriture pour m’exprimer, pour créer. C’est là où j’arrive le plus à être moi-même. J’avais cette envie d’aller dans une proposition exclusivement comique, ça me titillait depuis longtemps, parce que je suis très admirative des gens qui arrivent à faire mouche avec une écriture humoristique implacable, comme Louis CK, Blanche Gardin, Marina Rollman, Ricky Gervais. C’est aussi la suite d’une démarche que j’ai entreprise avec mon dernier spectacle «Olympia», qui était un spectacle de poésies. Je pense que pour qu’une blague fasse rire ou pour qu’un poème soit juste, il s’agit du même cheminement. Il y a cette recherche de la vérité, de la justesse de la vérité. D’aller droit dedans. Il n’y a que comme ça qu’on touche les tripes.

Comment est né votre projet de seule-en-scène d’humour?
Je démarre toujours une création avec des contraintes. J’ai choisi le stand-up parce que le format est ultra défini: pas de décor, pas de personnage, pas de lumière et une adresse directe au public. J’avais aussi une idée précise du costume: un motif mur de brique. J’ai besoin de contrainte pour pouvoir inventer et exprimer ma singularité.

Est-ce que c’est compliqué de faire rire?
Très. C’est redoutable et brutal parce que le résultat est devant vous. Au théâtre dans d’autres registres, on ne sent pas forcément quand on est à côté de la plaque. Là, avec le stand-up on s’en prend plein la tronche!

Quelle est la place et le rôle de l’humour dans ce monde agité, perturbé, voire anxiogène?
Comme je le dis dans mon stand-up, je pense que l’humour est le nouveau porno. C’est addictif, il y a une sorte de nécessité urgente de rire un bon coup dans ce monde sous tension.

Comment définiriez-vous votre humour?
Je ne saurais pas le définir. J’estime qu’il est engagé parce qu’il est écrit, ce n’est pas de l’improvisation. Tout ce qui sera dit a été pensé, réfléchi. Je dois donc porter mes mots avec un engagement total et les assumer pleinement.

Et dans la vraie vie, est-ce que vous êtes drôle?
Oui.

Marina Rollman vous a accompagnée pendant l’écriture et la création de ce spectacle…
Marina m’a aidée sur la structure et la mécanique comique de l’écriture. C’est un regard dramaturgique sur les ressorts, les thèmes et la dynamique du spectacle. Un regard brillant et bienveillant.

Vous êtes genevoise, mais vous avez choisi un petite salle lausannoise pour cette première. Ce n’est d’ailleurs pas un théâtre, mais un club! Pour quelles raisons? Le public lausannois est-il plus sympa que le public genevois?
Le spectacle est coproduit par les théâtres Arsenic, Boulimie et Saint Gervais. Nous cherchions un lieu qui puisse réunir tous les spectateurs de ces institutions. Et le public suisse est extra, peu importe les cantons!

Vous serez aussi bientôt sur la scène du Couleur 3 Comedy Club, qui aura lieu du 30 septembre au 2 octobre prochain. Vous faites maintenant partie de la grande famille de l’humour romand?
Etant donné que ce seront mes premières scènes comiques, je choisis l’humilité en vous répondant qu’il est trop tôt pour le dire. Et aussi que je ne cherche pas à être une comique exclusivement. Je souhaite continuer à développer ce que j’ai commencé à entreprendre depuis ma sortie d’école: la mise en scène, le jeu, l’écriture… Peut-être même le cinéma.

On vous a vue plusieurs fois dans des productions télévisées pour la RTS, dans des parodies pour 52 Minutes, et on vous entend parfois faire des chroniques sur la Première. Vous êtes une touche-à-tout!
Oui j’ai une frénésie de créer, j’ai de la peine à freiner même si ça fait beaucoup. Je suis une personne qui, dans la vie, est terrifiée par presque tout, la scène est le seul endroit où j’arrive à aller avec ma peur et à en faire un moteur, c’est sans doute pour ça que j’en ai autant besoin.

Rebecca Balestra - stand-up. Bar club abc - les jeudis 15, 22 et 29 septembre ainsi que le jeudi 6 octobre, à 19h et 21h.