Il faut aller chez Moutarlier à l’heure du goûter pour se rendre compte qu’il n’y a pas que l’argent et l’amour qui font tourner le monde. Il y a aussi la gourmandise, qui peut être cela dit vite reliée aux deux premiers. C’est un ballet d’éclairs et de macarons qui se met en branle quand sonnent 16 heures, dans un joyeux maelström de générations et de nationalités. Ici une tablée d’étudiantes suisses allemandes, là-bas des amoureux chinois et là des amoureux d’ici, sans oublier des tablées mamans/enfants en plein goûter, et quatre grands-mères dont une que je connais, popaie de son état à la crèche en bas de chez moi. Les popaies, ce sont ces ainés qui passent des après-midis en crèche pour proposer diverses activités aux enfants en fonction de leurs intérêts, créant ainsi un échange intergénérationnel tendre et enrichissant. Le quartet de dames savoure infusions et pâtisseries à tomber, bien au chaud dans le décor contemporain et clair du salon de thé: baba au rhum, dôme framboise, tarte au citron et amandine poire, issus du savoir faire reconnu de Lucien Moutarlier, breton (enfin nantais, mais c’est tout comme, ne chipotons pas!), venu s’installer en Suisse en 1979, en membre de la prestigieuse association Relais Desserts qui regroupe les cent meilleurs pâtissiers du monde.
La salle bruisse d’éclats de cuillers sur des assiettes trop vite finies. Un enfant se met à pleurer, et je me demande comment on peut être triste dans ce lieu où tout n’est que douceurs, lumière et volupté. Les deux majestueux hiboux qui encadrent la façade de verre et d’acier de l’établissement ouvert en 1996 semblent garder d’un bon œil ce palais pour nos palais dans lequel se décline chaque jour un nuancier coloré de gourmandises.