Un étudiant de l'UNIL traque l’insaisissable panthère des neiges

ÉCOLOGIE • Doctorant à l’UNIL, Claudio Augugliaro, est l’un des plus grands spécialistes du mythique félin en Suisse. De passage à Lausanne, il nous a raconté ce que cet animal lui apporte.

  • Claudio Augugliaro à Dorigny lors de son entretien avec Lausanne Cités.

    Claudio Augugliaro à Dorigny lors de son entretien avec Lausanne Cités.

Claudio Augugliaro pendule entre Oulan-Bator, où il réside avec son épouse mongole et leur enfant, et sa zone d’étude située à 1400 km de là.

S’il est un animal qui fascine c’est bien la panthère des neiges! Claudio Augugliaro, doctorant à l’UNIL, est presque aussi insaisissable que ce grand félin auquel il consacre une bonne partie de sa vie depuis 2016 en vivant toute l’année en Mongolie. Nous avons pu rencontrer le scientifique lors d’un de ses rares passages sur le campus de Dorigny.

L’entretien débute sur cette étonnante confidence: «Je n’ai jamais vu de mes yeux une panthère des neiges en liberté et c’est évidemment une frustration pour moi…» Les pièges photographiques qu’a posés l’Italien de 43 ans ont en revanche eu cette chance. Tout comme certains des quelque 260 bergers qu’il a longuement interviewés sur la question pour sa thèse dans le nord-ouest de la Mongolie. Dans leurs yourtes, des peaux témoignent d’ailleurs parfois que la confrontation avec l’animal a tristement tourné à leur avantage… La chose est non seulement illégale mais elle peut les conduire en prison. Ils le savent désormais grâce aux campagnes de sensibilisation de l’ONG «Irbis Mongolia».

Une espèce vulnérable

Mais si la panthère des neiges demeure sur la liste rouge des «espèces vulnérables» de l’Union internationale pour la conservation de la nature, c’est aussi et surtout car les compagnies d’extraction minérales détruisent leur environnement et les effraient avec leur bruit et que les troupeaux de chèvres et de moutons qu’elles convoitent sont aussi la proie des loups. Cerise sur l’amer gâteau: le réchauffement climatique pourrait provoquer une montée en altitude de la ligne des arbres, laquelle marque le début du territoire de la panthère des neiges.

Claudio Augugliaro pendule entre Oulan-Bator, où il réside avec son épouse mongole et leur enfant, et sa zone d’étude située à 1400 km de là.

Sa fascination pour la panthère des neiges remonte à l’enfance. «Gamin, je restais scotché devant les documentaires animaliers de la BBC. La panthère des neiges me plaisait particulièrement pour son côté insaisissable et solitaire et ses yeux gris-vert si particulier. Elle peut sauter à plus de 7 m de haut, tuer des animaux de plusieurs fois son poids, escalader des parois très raides et parcourir une soixantaine de kilomètres par jour», s’enthousiasme Claudio qui avant de reprendre ses études officiait dans le commerce international de cactus.

Un marin devenu montagnard

Ses travaux ont fait de ce «marin» sicilien d’origine un vrai montagnard. «La panthère m’a poussé à cette métamorphose. Grâce à elle, il m’arrive de parcourir 25 km à pied en une journée par -10°c pour aller placer un piège photographique en altitude. C’est dur mais instructif car je me confronte ainsi à mes limites en immersion dans une nature sauvage.» Sa traque et le «contact avec la création» qu’elle permet pousse cet agnostique revendiqué vers des «perceptions d’ordre spirituel allant au-delà de la religion».

Ses études ont aussi l’avantage de nourrir l’admiration qu’il porte aux autochtones. «Ces bergers vivent plus en contact avec les autres espèces que la plupart des occidentaux. Il n’y a pas de distance entre la nature et eux. Leur vision n’est pas anthropocentriste. Ils se voient presque comme une espèce parmi les autres dans l’écosystème…» Comme quoi même sans jamais l’avoir vu, la panthère des neiges peut dispenser à l’homme de sacrées leçons!