«Un cimetière dans cet état? C’est tout bonnement scandaleux!»

CIMETIERE • Haies non-taillées, feuilles mortes, herbes folles entre les tombes, l’entretien du cimetière du Bois-de-Vaux est sous le feu des critiques. La Ville se justifie en rappelant que le lieu est géré de manière écologique.

«On attend souvent d’un cimetière qu’il soit entretenu à la perfection. Le cimetière du Bois-de-Vaux ne déroge pas à la règle. C’est sans doute l’un des plus beaux cimetières de Suisse.» Sur son site Internet, la Ville de Lausanne ne tarit pas d’éloges sur le lieu de recueillement situé à deux pas de la Vallée de la Jeunesse. De quoi faire bondir Olivia Zané. Cette retraitée habitant Ouchy estime que l’état du cimetière se dégrade fortement depuis plusieurs mois: «Mon époux y repose. Je m’y rends donc très souvent et je trouve que c’est de pire en pire. Les haies et autres arbustes ne sont pas taillés, les tombes pas entretenues, les feuilles sur les pierres tombales jamais soufflées, c’est tout bonnement scandaleux! En plus, il s’agit d’un lieu de recueillement et non d’un parc ou d’un bout d’herbe le long d’une route. Cela m’attriste profondément.»

Volonté politique

Pour remédier à cette situation, elle a décidé de prendre le taureau par les cornes. En vain: «Toutes mes réclamations sont restées lettre morte. Sur place, l’un des responsables de l’entretien m’a avoué qu’il n’y a pas assez de personnel. Ils font donc ce qu’ils peuvent, mais cela ne peut plus continuer. Et je ne suis pas la seule à me plaindre, beaucoup de familles estiment que l’état du cimetière est déplorable.» Un qualificatif qui agace Natacha Litzistorf, municipale en charge du logement, de l’environnement et de l’architecture: «C’est un terme excessif et assez peu respectueux du travail sérieux des collaborateurs. L’état actuel du cimetière reflète une volonté politique de ne plus polluer les sols et d’entretenir tous les espaces verts de manière écologique. Sans oublier les récentes intempéries qui ont empêché une intervention de coupe normale.»

Invasion végétale

En se baladant le long des allées, le constat est évident. Si certaines sont parfaitement entretenues, d’autres, nombreuses, semblent colonisées par la végétation. Une apparence de désordre que Natacha Litzistorf justifie: «Les haies sont taillées régulièrement, c’est-à-dire tous les deux ans. Les herbes hautes sont la plupart du temps de la prairie, cette dernière permet d’améliorer la biodiversité en ville. Concernant les feuilles, elles ne sont pas soufflées sur les tombes de manière systématique, par contre elles sont ramassées en automne.»

Entretien différencié

L’abandon des produits chimiques en 2010 y est-il aussi pour quelque chose? «Cela n’a effectivement pas été facile à gérer, mais il est nécessaire pour la santé des habitants et des jardiniers. Nous avons appris à maîtriser la pousse des mauvaises herbes, sans recourir à des produits chimiques, pour atteindre une bonne qualité d’usage tout en laissant la nature s’exprimer.» Un entretien différencié qui plaît à certains, mais ne convainc toujours pas Olivia Zané: «Un cimetière se doit d’être propre, c’est un lieu chargé d’affectivité. Je suis certaine que l’on peut faire vraiment beaucoup mieux.»

Le cimetière se met au vert, l'éditorial de Fabio Bonavita

Si Alphonse Laverrière se baladait aujourd’hui dans le cimetière du Bois-de-Vaux, quelle serait sa réaction? Lui qui œuvra durant plus de trente ans à la construction de ce lieu emblématique pour les Lausannois, serait-il charmé par le spectacle des mauvaises herbes qui prolifèrent? Des haies de guingois? Des feuilles mortes qui ne se ramassent plus à la pelle?

On peut en douter. Car en 1951, lorsque les travaux arrivent à leur terme, le cimetière a fière allure. Les bassins et les plantations lui donnent presque des airs de jardin à la française. Tout est parfaitement aligné, l’ensemble fait la fierté des habitants. Septante ans plus tard, ils sont toujours plus nombreux à s’offusquer de l’entretien du plus grand cimetière de Suisse romande (lire en page 5). Oui, car depuis, on y a fait le choix de l’entretien différencié, une gestion écologique qui permet à la nature de s’exprimer. On coupe de moins en moins souvent, on abandonne les pesticides et les engrais.

Une méthode intéressante qui révèle cependant toutes ses failles au cimetière du Bois-de-Vaux. Il apparaît urgent d’y remédier car entretenir un tel lieu, ce n’est pas gérer un giratoire. Il en va du respect de nos défunts et de leurs proches…