Ah le patrimoine! A Lausanne, les oppositions aux mises à l’enquête défendant la protection du patrimoine sont nombreuses. A la rue du Bugnon, un nouveau projet immobilier ne fait pas exception à la règle, car il prévoit la démolition partielle de l’Hôtel de l’Ours, une bâtisse construite durant la première moitié du 19ème siècle sous la direction de l’architecte Henri Perregaux, et qui s’est vu transformée notamment par l’ajout, en 1891, d’une partie supplémentaire.
Une note d’intérêt local
C’est précisément cette partie rajoutée après coup qui risque d’être détruite si la mise à l’enquête, terminée depuis le 16 décembre, débouche sur un permis de construire. Le hic, selon François Mercanton, président du Mouvement de défense de Lausanne (MDL), c’est que toute la bâtisse, y compris cet ajout, est recensée en note 3, donc d’intérêt local, au patrimoine. Mais cette note est délicate, «il s’agit uniquement d’un recensement et ne signifie en aucun cas une impossibilité de détruire», précise François Mercanton. C’est pourquoi le MDL a fait opposition à cette mise à l’enquête, pour une question de conservation du patrimoine mais également d’esthétique et d’intégration dans l’espace bâti alentour.
Garder des témoins du passé
«Architecturalement, il ne s’agit pas de la maison la plus incroyable de Lausanne. Mais notre but est de garder des témoins du passé, sans trop les altérer. L’Hôtel de l’Ours est un témoin vivant du développement de cette place depuis une époque où Lausanne était encore campagnarde», remarque François Mercanton.
Mais que l’on ne s’y trompe pas, les gabarits encore visibles sur la route concernent un autre projet immobilier mené par Bernard Nicod et qui devrait remplacer l’ancien garage. A côté, c’est la société immobilière STM, basée à Bretigny-sur-Morrens, qui prévoit d’encastrer, entre la future construction de Bernard Nicod et l’Hôtel de l’Ours, un petit immeuble exigu contenant 11 appartements de deux pièces, impliquant donc la démolition partielle de l’Hôtel de l’Ours.
Une chance pour l’Hôtel?
En revanche, pour le directeur de l’Hôtel de l’Ours Jean-Pierre Hessmann, ce projet est une aubaine. «Plusieurs fois nous avons fait des demandes pour modifier et embellir l’hôtel, mais nous nous sommes souvent heurtés à un refus en raison de son recensement.» Avec ces constructions, le directeur espère réussir à trouver une porte ouverte à des projets d’amélioration de l’hôtel.
De plus, le président du MDL redoute les dégâts qui pourraient survenir à cause des travaux. «Lorsque l’on touche à une construction plus que centenaire, nous ne pouvons pas prévoir les complications pouvant survenir en cas de déstabilisation des fondations, ou de dégâts concernant la toiture.» Si une telle chose arrivait cela «pourrait donner lieu à une destruction totale ultérieure pour raisons de sécurité ou de frais trop élevés pour le maintien».
De son côté, la Municipalité n’a pas encore pris connaissance du projet et traitera les deux demandes de construction – celle de Bernard Nicod et de STM – en même temps. Le syndic Grégoire Junod confirme cependant que la déléguée au patrimoine de la Ville a donné un préavis positif au projet.Joëlle Misson