«A Lausanne, la mendicité n’a pas d’avenir»

SECURITE • Pierre-Antoine Hildbrand, municipal en charge de la sécurité, entend mettre un terme à la mendicité intrusive et agressive dans les rues lausannoises. Pour y parvenir, il devra convaincre le canton de Vaud qui a mis en consultation un projet de révision de sa loi sur la mendicité.

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"Je ne supporte pas l’idée que des personnes utilisent des enfants pour mendier"

A la suite d’un jugement de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), la mendicité n’est plus sanctionnée à Lausanne depuis janvier 2021. Cette décision de Strasbourg oblige le canton de Vaud à modifier sa loi, Pierre-Antoine Hildbrand, municipal en charge de la sécurité, souhaite que ce dernier fasse preuve de fermeté en adoptant une liste de lieux où il sera formellement interdit de faire la manche.

Lausanne Cités: Le canton de Vaud doit adapter sa loi sur la mendicité à cause d’une décision de la Cour européenne des droits de l’homme, vous comprenez que cela puisse agacer ceux qui sont attachés à la souveraineté cantonale?
Pierre-Antoine Hildbrand: Oui, je peux le comprendre. Mais notre système repose sur deux piliers, la démocratie et les droits de l’homme. Cela implique, qu’en dernier recours, on puisse saisir la justice.

Vous estimez que l’avant-projet proposé par le canton est trop permissif, c’est ce qui a motivé Lausanne à dresser une liste de lieux où il sera interdit de faire la manche, vous avez des exemples?
La mendicité intrusive ou agressive porte atteinte à la liberté de choix des passants de donner ou non. Il faut donc l’interdire dans les transports publics et aux abords des arrêts, quais, débarcadères, dans les marchés, à l’intérieur des magasins, commerces et administrations et à proximité de leurs entrées, sur les terrasses, dans les places de jeux, jardins et parcs publics. Le but est que la police puisse agir, et que les mendiants sachent précisément ce qui est interdit.

En d’autres termes, vous souhaitez pourrir la vie des mendiants?
Je ne supporte pas l’idée que des personnes utilisent des enfants pour mendier. Pour le reste, je souhaite m’attaquer à la mendicité et non aux mendiants. Il existe d’autres moyens de gagner sa vie. Mon but consiste d’abord à montrer que la mendicité n’a pas d’avenir en terres lausannoises.

Vous avez facilement pu convaincre l’ensemble de la Municipalité de vous suivre?
La collégialité implique que chacun fasse, de temps en temps, un pas vers l’autre. C’est à cette condition qu’un exécutif peut être efficace.

Si votre liste est reprise par le Conseil d’Etat, que fera la police si les mendiants s’installent tout de même aux abords de la gare ou à la rue de Bourg?
Dans un premier temps, elle avertira les mendiants en les invitant à quitter les lieux. Ensuite, elle fera son travail de dissuasion en occupant ces espaces.

Donc les policiers se baladeront, mais n’amenderont personne, est-ce vraiment dissuasif?
Le but n’est pas de délivrer des amendes qui ne seraient jamais payées. La présence policière est efficace car elle dissuade les demandes et les dons.

Par contre, quand les mendiants se trouvent au feu rouge, la police lausannoise agit?
Oui, des contrôles sont systématiquement menés lorsque la mendicité est susceptible de créer des dangers, par exemple sur la route, auprès d’automobilistes. Au carrefour de l’avenue de Provence, depuis le début de l’année, la police est intervenue à 83 reprises pour un tel problème et a procédé à 60 dénonciations à la Loi sur la circulation routière (LCR). Cinq individus différents ont été dénoncés à la justice.

La consultation cantonale a pris fin le 31 août, vous avez bon espoir que les revendications lausannoises seront entendues?
Oui, je l’espère vraiment car Lausanne concentre une grande part de la mendicité cantonale et le nouveau Conseil d’Etat aura certainement à cœur d’agir. Ce dernier devra préciser son projet. Il sera ensuite voté, tel quel ou non, par le Grand Conseil.

Une ville de Lausanne sans mendiants, vous y croyez?
Dans l’idéal, personne ne devrait être obligé de mendier. Le filet social, financé par les contribuables, est précisément prévu pour éviter de telles situations.