Drame de Moria: Lausanne s’engage

AIDE HUMANITAIRE • Face à la situation humanitaire dramatique des quelque 12’500 réfugiés qui se trouvaient dans le camp de Moria, sur l’île grecque de Lesbos, détruit par les flamme, nombre de villes européennes s’insurgent. Elles poussent leurs Etats à accueillir des rescapés. A l’instar de celle de Lausanne.

  • Une quarantaine de personnes, dont le syndic de Lausanne Grégoire Junod (à gauche), ont participé à la flash mob pour demander l’accueil des réfugiés de Moria. KEYSTONE/LAURENT GILLIERON

    Une quarantaine de personnes, dont le syndic de Lausanne Grégoire Junod (à gauche), ont participé à la flash mob pour demander l’accueil des réfugiés de Moria. KEYSTONE/LAURENT GILLIERON

Un «drame», un «désastre» ou encore une «catastrophe». Au lendemain de l’incendie qui a récemment dévasté le camp de réfugiés de Moria, sur l’île de Lesbos, les qualificatifs ne manquaient pas dans la presse pour résumer la situation. Et susciter un peu partout en Europe des promesses d’aide, notamment en termes d’accueil, venant de villes qui ont souvent réagi beaucoup plus vite que les gouvernements eux-mêmes. En Suisse aussi, ou la politique d’asile relève essentiellement de la compétence de la Confédération et des cantons, plusieurs cités, dont Lausanne, ont appelé celle-ci à convoquer rapidement une conférence nationale afin de mettre concrètement en œuvre un accueil immédiat. En fustigeant au passage son attitude consistant à n’accepter qu’une vingtaine de mineurs non accompagnés issus du drame de Moria.

Un drame humanitaire

«Je suis choqué. Personne ne demande à la Suisse d’accueillir tout le monde, mais nous devons faire notre part. Vingt mineurs en tout et pour tout, c’est indigne!», réagit Grégoire Junod. «Septante pourcent des Suissesses et des Suisses vivent en zone urbaine. Les Villes doivent être mieux écoutées.» Elles souhaitent ainsi l’organisation d’une conférence nationale sur le sujet. «Nous lançons un appel. Et comme nous l’avons toujours fait par le passé, nous sommes prêts à collaborer étroitement avec l’EVAM pour trouver des solutions d’hébergement à Lausanne. Nous avons également, dans le cadre de nos budgets de coopération, engagé des soutiens sur place, à Lesbos», explique encore le syndic de Lausanne.

Reste que si cette démarche est généralement bien accueillie, des voix s’élèvent aussi pour dire qu’elles craignent qu’une décision plus généreuse ne favorise une montée des populismes. Une position que le syndic de Lausanne balaie d’un revers de la main. «L’accueil des réfugiés suscite toujours des critiques avec le soupçon d’en faire plus pour les autres que pour celles et ceux qui vivent ici. Mais ce n’est pas le cas. Evitons de nous opposer les uns aux autres. Nous avons les moyens d’honorer notre tradition humanitaire sans que cela ne porte atteinte aux efforts que nous engageons ici pour soutenir les Lausannoises et Lausannois dans cette période difficile de crise sanitaire et économique.»

«La Suisse peut faire beaucoup plus!»

Dans son ouvrage «Lesbos, la honte de l’Europe» (Edition du Seuil, 2020), Jean Ziegler, vice-président du comité consultatif du Conseil des droits de l’homme auprès des Nations Unies, livrait un récit glaçant de sa visite du camp de réfugiés de Moria, accusant l’Union européenne d’une stratégie délibérée de refoulement et de dissuasion vis-à-vis des migrants. Il décrivait les conditions de vie infâmes de ceux-ci, entassés dans des baraquements de fortune et dans des conditions d’hygiène affreuses.

«J’ai chaque jour des contacts sur place et je peux vous dire que la situation s’est agravée», ajoute-t-il aujourd’hui. «Quelque 12’000 personnes, parmi lesquelles beaucoup d’enfants, sont totalement isolées. L’accès aux villages de l’île leur est interdit.» Jean Ziegler exhorte donc à nouveau la Suisse à faire plus en matière d’accueil. «Nous devons dire stop à cette barbarie et , dans ce contexte, le Conseil fédéral comme l’Union européenne font preuve d’une arrogance et d’un mépris inacceptables.»