Déchets sauvages à Lausanne: «La répression sera nécessaire pour certains»

Natacha Litzistorf, municipale en charge du logement, de l'environnement et de l'architecture, confirme nos constats sur place, les vagues de déchets sauvages à Vidy n’ont pas la même ampleur cette année. Malgré cette bonne nouvelle, la vigilance reste de mise. Interview.

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Lausanne Cités: Après un été 2021 marqué par des scènes répétées de porcherie au bord du lac, ce début de saison estivale semble plus apaisé, vous faites le même constat?
Natacha Litzistorf: En 2021, les scènes répétées se sont surtout produites en début de saison. Le Covid a empêché les gens de voyager et ils se sont donc rabattus au bord du lac. Nous avions ajusté le tir et pris des mesures en cours de saison qui ont eu quelques résultats positifs. En 2022, nous avons anticipé la saison dès le début de l’année. Il faut aussi noter que les gens voyagent à nouveau, cela a ainsi relâché la pression sur les espaces verts du bord du lac.

Donc ça va mieux?
Nous pouvons affirmer que cela va effectivement mieux puisque les responsables des gardes n’ont pas eu besoin de demander aux collaborateurs de faire des heures supplémentaires pour le nettoyage.

Comment expliquez-vous cette actuelle amélioration?
Cela s’explique par diverses mesures prises. Les actions de prévention menées par les collaborateurs et collaboratrices du Service des parcs et domaines (SPADOM), mais aussi par des étudiants engagés qui distribuent aux usagers des cendriers pour les mégots et des sacs plastiques pour les déchets. Les tournées de prévention se font dans les parcs situés au bord du lac et au centre-ville. De plus, des passages sont effectués par des correspondants de nuit tous les soirs de rassemblement. Sans oublier la présence policière en fin de semaine, des autocollants réfléchissants posés sur les bennes à ordures afin de les signaler dans la nuit ou encore, notamment, un plan de communication sur les réseaux sociaux.

On vous sent rassurée. Aviez-vous peur de voir les mêmes scènes se répéter cette année?
Peur n’est pas le mot, mais nous étions sur nos gardes. C’est pour cela que des mesures fortes ont été prises.

L’été n’est cependant pas encore terminé, vous attendez le mois de septembre pour crier victoire?
Nous sommes assez humbles pour ne pas crier victoire dans ce domaine. Mais le plus gros de la vague est déjà passé, le pic de fréquentation se situant à la fin des examens des gymnases et de l’université. Néanmoins, il est vrai que nous ne sommes jamais à l’abri d’un débordement. C’est pour cela que la Ville ne relâche pas ses efforts et reste vigilante.

S’il y a un mieux, il reste tout de même du travail. Ces derniers lundis matin, on pouvait toujours dénombrer plusieurs sacs de charbon éventrés, de nombreux mégots de cigarette, des restes de nourritures et des emballages à Vidy, c’est toujours trop?
En effet, il restera toujours un pourcentage de la population qui ne se sent pas concerné par le littering ou la pollution de la planète.

Un débat agite la population de l’agglomération lausannoise, certains estiment que ce sont les jeunes éméchés qui agissent ainsi, d’autres pensent que ce sont plutôt les familles, qui dit vrai?
Nous ne pouvons pas donner de profil type. Néanmoins nous remarquons qu’il y a deux types d’usagers: d’une part, les usagers de jour qui sont surtout des familles qui viennent profiter des espaces verts et avec lesquels il y a peu ou pas de déprédations. D’autre part, les usagers de soirée et de nuit qui viennent plutôt pour faire la fête. Il est probable que l’abus d’alcool favorise les comportements inadéquats. C’est peut-être aussi un problème d’éducation et de rébellion envers la société.

Quelle solution pour changer le comportement de ceux qui abandonnent encore et toujours leurs déchets au bord du lac?
La Ville mise sur l’anticipation en termes d’organisation de la saison, la coordination interservices, la sensibilisation et, au besoin, la répression.

Vous évoquez la répression, on a l’impression qu’elle n’aura finalement pas été nécessaire pour faire cesser certaines mauvaises habitudes. Vous confirmez avoir voulu d’abord miser sur la sensibilisation?
La répression sera toujours nécessaire pour un nombre restreint de personnes. Depuis le début de l’année, le SPADOM a dénoncé 29 personnes pour des comportements irrespectueux dans les parcs.

Si la situation s’est améliorée à Vidy, nous avons reçu des témoignages de poubelles qui débordent au parc de Milan, quelle est votre explication?
En 2022, le concept et le type de poubelles a changé au parc de Milan. Le but est de mettre des poubelles avec une plus grande capacité. Nous sommes contents du résultat, du retour de nos collaborateurs et des usagers. Quant aux poubelles pleines, il peut arriver que le canal de descente soit bouché par des cartons de pizza, mais en général la capacité de la poubelle est suffisante (1000 litres) pour ne jamais être pleine.

Traquer sans relâche les derniers récalcitrants, l'éditorial de Fabio Bonavita

Soyons sincères, tout le monde s’attendait cet été à ce que Vidy se transforme une nouvelle fois en porcherie à ciel ouvert. Il faut dire que les images choquantes de l’an dernier montrant des montagnes de déchets au parc Louis Bourget étaient encore bien ancrées dans les esprits. Eh bien, il faut l’avouer, nous avions tort. Au vu des nombreux constats effectués sur le terrain par notre photographe, la situation s’est globalement améliorée (lire notre article en page 5).

Tout n’est pas idyllique pour autant, les lundis matin à Vidy, on trouve toujours quelques mégots de cigarette, des sacs de charbon éventrés et des bouteilles vides, mais les vagues de détritus semblent appartenir au passé. En mettant le paquet en matière de sensibilisation, spécialement au bord du lac, la Ville est parvenue à endiguer un phénomène qui agace au plus haut point la population. Une stratégie tout en douceur qui semble donc avoir porté ses fruits. Preuve que la persuasion peut être aussi efficace que la répression.

Oui, mais il reste les derniers récalcitrants. Ceux à qui on a expliqué maintes et maintes fois qu’un déchet n’a rien à faire dans un buisson ou sur une pelouse. Les mêmes qui savent pertinemment où sont les bennes à ordure, mais qui, par flemme ou manque d’éducation, continuent de se comporter comme des porcs. Pour ceux-là, il ne faut faire preuve d’aucun ménagement. Et même s’ils ne représentent qu’une minorité des amateurs de baignade ou de barbecue, ils doivent être traqués sans relâche et amendés. Un jour peut-être, ils comprendront ce que signifie vraiment le fait de vivre en société.