«A cause de ces deux éoliennes, mes maisons ne vaudront plus rien!»

GROGNE • Deux des huit éoliennes du parc EolJorat Sud, prévu en 2026 sur la partie lausannoise des bois du Jorat, seront installées près des maisons de Philippe Mazenauer. Cet habitant du Chalet-à-Gobet se dit humilié par l’absence de solutions proposées par la Ville.

  • Philippe Mazenauer a fait réaliser un photomontage qui démontre, selon lui, l’enfer qui l’attend en 2026. En arrière-plan, ses deux maisons. DR

    Philippe Mazenauer a fait réaliser un photomontage qui démontre, selon lui, l’enfer qui l’attend en 2026. En arrière-plan, ses deux maisons. DR

Ses années de démarches judiciaires, tracas administratifs et autres séances d’informations auront au moins enseigné une chose à Philippe Mazenauer: David ne gagne pas toujours contre Goliath. Car cet opposant de la première heure au parc EolJorat Sud le sait, les huit éoliennes prévues dans les bois du Jorat seront une réalité en 2026. Désormais, il souhaite simplement pouvoir refaire sa vie ailleurs.

En d’autres termes, que la Ville de Lausanne lui propose un autre terrain: «Il faut se mettre une seconde à ma place. Du jour au lendemain, j’apprends que deux éoliennes géantes vont être installées à côté de mes maisons. Une à 539 mètres et l’autre à 636 mètres. Ma banque me dit de vendre au plus vite, mais je ne trouverai aucun acheteur prêt à s’installer sous ces monstres d’acier. En gros, mes deux maisons ne valent plus un centime alors que j’ai travaillé toute ma vie pour me les offrir. C’est vraiment scandaleux! D’autant qu’il n’y a pas de vent dans cette région!»

Imbroglio à trois

Pour comprendre cette colère, il faut remonter trois ans en arrière. Le 11 octobre 2019, une séance est organisée dans les bureaux de Si-Ren, une société, propriété de la Ville de Lausanne, dont la mission est de développer les installations solaires, les éoliennes, la biomasse et la géothermie dans la région. Sont présents des représentants de Si-Ren, Jean-Yves Pidoux, à l’époque municipal en charge des Services industriels et Philippe Mazenauer. Ce dernier se souvient avoir eu bon espoir que la Ville entende enfin ses revendications: «Jean-Yves Pidoux m’a dit vouloir étudier la possibilité de me trouver un autre terrain en remplacement de celui où se trouvent mes deux maisons. Les représentants de Si-Ren m’ont également promis qu’ils allaient réaliser un photomontage des éoliennes pour que je me rende compte de ce qui m’attendait. Trois ans après, je n’ai reçu ni nouvelle de la Ville, ni visuel de Si-Ren, je me sens tout simplement humilié.» Nous nous sommes procuré les échanges de courriels entre Si-Ren et Philippe Mazenauer, ils confirment les propos de ce dernier. Entré en fonction en avril 2021, soit bien après la fameuse séance, le directeur de Si-Ren Xavier Righetti tente une explication: «Les profils de terrain avec les éoliennes concernées lui ont été transmis en novembre 2019.» Les profils de terrain, mais pas le photomontage permettant d’avoir une vue d’ensemble. Du côté de la Ville, Xavier Company, le municipal qui a succédé à Jean-Yves Pidoux à la tête des Services Industriels (SIL), semble surpris lorsqu’on lui parle d’une proposition de relogement faite par son prédécesseur: «Je n’ai jamais entendu parlé d’une telle promesse et cela m’étonnerait fortement qu’elle ait été faite.» Avant d’annoncer: «La mise à l’enquête devrait avoir lieu entre le dernier trimestre 2022 et le premier trimestre 2023. Nous avons prévu de rencontrer la population de la région concernée avant la mise à l’enquête, comme cela a été le cas pour le plan d’affectation.»

Fin des barbecues...

Quant au principal intéressé, l’ancien directeur des SIL Jean-Yves Pidoux, il fait preuve d’une certaine retenue: «Je ne peux confirmer ou infirmer ce que dit Philippe Mazenauer car celui-ci, lors de notre séance, a exigé une totale confidentialité. Libre à lui de s’épancher aujourd’hui dans les médias, pour ma part je me tiens à cet engagement. Ce qui est clair, c’est que son souci concerne la moins-value de ses maisons et non l’effet des éoliennes sur le paysage ou la biodiversité.» De quoi faire bondir Philippe Mazenauer: «On me mène en bateau depuis des années, j’ai bien compris que la Ville se fiche des habitants du Chalet-à-Gobet. On m’a déjà annoncé qu’avec ces deux éoliennes à proximité, je ne pourrais plus faire de barbecues sur ma terrasse, je grillerai donc ma viande à l’intérieur, c’est délirant.»