Suzette Sandoz: "Faut-il mourir pour Kaboul?"

Professeure honoraire à l’Université de Lausanne, Suzette Sandoz s'interroge:  peut-on être vainqueur sur une terre étrangère dont on ignore tout: culture, histoire, territoire?

Le désastre humain de l’Afghanistan et l’appel à l’aide de la communauté internationale par des opposants aux talibans rappellent la terrible question de la Seconde Guerre mondiale: faut-il mourir pour Dantzig ? C’est l’occupation par Hitler, le 1er septembre 1939,  de cette ville polonaise érigée en Ville libre dans un couloir entre la Pologne et l’Allemagne qui a provoqué la déclaration de guerre de la Grande-Bretagne et de la France: on ne pouvait pas laisser violer la liberté de Dantzig sans réagir. On connaît la suite… 

Alors, faut-il mourir pour Kaboul? A peine libéré en 1989 de l’occupation par l’URSS, l’Afghanistan tombe sous un régime islamiste, puis sous la férule des talibans, islamistes radicaux, cachant en leur sein Al Qaïda et un certain Oussama Bin Laden. Les attentats contre les deux tours de New York et le Pentagone, le 11 septembre 2001, déclenchent à juste titre la colère américaine, mais une fausse réaction: pour lutter contre le terrorisme et punir les auteurs des crimes, les Américains envoient des troupes en Afghanistan. L’échec était programmé. On ne peut être vainqueur sur une terre étrangère dont on ignore tout: culture, histoire, territoire.

La démocratie ne s’exporte pas comme les armes. Le terrorisme n’est pas une guerre militaire classique, c’est une guerre de religion. Appelés à l’aide par des populations en pleine guerre civile, les USA et les pays occidentaux sont intervenus au nom de la démocratie qu’ils croyaient pouvoir instaurer partout. Ils ont oublié qu’une armée étrangère n’est jamais aimée...