Les hôteliers vent debout contre la taxe de séjour

Afin de financer le Centre de Congrès de Beaulieu, la Municipalité prévoit une augmentation de la taxe de séjour acquittée par les touristes.

Les hôteliers dénoncent une mesure susceptible de diminuer l’attractivité touristique de Lausanne.

L’histoire mouvementée de Beaulieu, entre crise et déficit chroniques, alimente en outre la défiance des hôteliers.

  • Seules 2 à 3 % des nuitées à Lausanne concerneraient des visiteurs qui se rendent à Beaulieu. LAUSANNE TOURISME

    Seules 2 à 3 % des nuitées à Lausanne concerneraient des visiteurs qui se rendent à Beaulieu. LAUSANNE TOURISME

«Comme d’habitude, je déplore le manque de concertation en amont de la Municipalité»

Susan Sax, présidente de GastroLausanne

«Quand j’ai annoncé à un des tours opérateurs avec lesquels je travaille que la taxe risquait d’augmenter d’un franc, sa réaction a été immédiate. Il a menacé de tout annuler et d’emmener ses clients en France voisine, sur Divonne ou Evian».

Pour bien des hôteliers lausannois, l’annonce a fait l’effet d’un douche froide. Le 31 août dernier en effet la Ville annonçait la reprise en main du site de Beaulieu, suite à une énième des crises qui ont émaillé sa longue histoire. Effet collatéral: la décision d’augmenter la taxe de séjour que paye chaque touriste qui visite Lausanne (lire encadré), afin de contribuer au financement de Beaulieu.

Seulement voilà: payée par les touristes et perçue par les hôteliers, la taxe de séjour renchérit la facture finale acquittée par les visiteurs. De quoi donc péjorer l’attractivité de Lausanne, au profit d’autres villes proches qui ne perçoivent pas de taxe ou des taxes d’un montant plus modeste.

«Pour une famille de 4 personnes qui séjourne dans la région pour une nuit, le supplément correspondrait à un renchérissement de 12 francs en moyenne a aussitôt réagi, dans un communiqué virulent, GastroLausanne, qui fédère les restaurateurs ainsi que des hôteliers lausannois. Le total des taxes à payer dépasserait 24 francs. Ce montant constitue un désavantage concurrentiel pour les hôtels de l’agglomération, par rapport aux villes avoisinantes (Genève, Nyon, Fribourg, Neuchâtel, Yverdon, mais aussi Divonne, Evian, Turin ou Lyon) qui n’ont pas de taxe de séjour aussi élevée. Cela entraînera une baisse des nuitées».

Peu d’enthousiasme

Autre grief, le manque de concertation de la part de la Municipalité qui selon Susan Sax, présidente de GastroLausanne, «veut à nouveau mettre la profession devant le fait accompli». Selon nos informations, la Municipalité a entamé une concertation avec les représentants de l’hôtellerie. «Nous avons réuni l’ensemble des hôteliers, confirme Grégoire Junod. Même si ce n’était pas l’enthousiasme, le climat était constructif et de bonnes questions ont aussi été posées».

Parmi celles-ci, et au-delà de la question de l’attractivité touristique de Lausanne, l’une prend une importance cruciale: appartient-il au milieu de l’hôtellerie de financer un centre de congrès comme celui de Beaulieu? Seules 2 à 3% des nuitées enregistrées à Lausanne concernent des personnes qui se rendent pour un congrès à Beaulieu, observe Eric Fassbind, lui même hôtelier et membre de GastroLausanne. Evidemment si le politique décide l’augmentation de la taxe, nous la répercuterons, mais est-il juste de demander à 97% des hôtes de financer une infrastructure qu’ils n’utilisent pas? Ceci d’autant qu’aucune étude sérieuse sur la viabilité économique de ce Palais des Congrès n’a été menée, et qu’à Lausanne de nombreux autres sites sont susceptibles d’accueillir des manifestations de ce type».

Un impact réel sur le tourisme

«Un centre de congrès a un impact réel sur l’hôtellerie et le tourisme d’affaire, justifie le Syndic Grégoire Junod. A Beaulieu, on parle, sans compter les foires, d’une fréquentation de 100’000 personnes pour le Centre, avec un potentiel d’augmentation important. Et Beaulieu dispose pour cela d’atouts uniques, en termes notamment de localisation et d’accessibilité. Montreux vient de décider d’augmenter sa taxe de séjour qui doit servir à la rénovation du 2M2C, son centre de congrès.»

Et d’ajouter: «Il y a un gros enjeu de confiance vis-à-vis de Beaulieu, et le manque d’enthousiasme des hôteliers est compréhensible.»

La rencontre entre les hôteliers et la Municipalité semble en tout cas à même de faire émerger de nouvelles pistes en faveur d’un compromis. L’une d’entre elles serait de taxer les chambres plutôt que chaque occupant. Avec un présupposé: la plupart des nuitées en solo correspondraient à celles de touristes d’affaires auxquels il serait plus juste de faire porter la charge d’un financement, même partiel, du Centre de Congrès de Beaulieu.