Les enseignants vaudois sur le front de la Covid-19

Pour l’heure, les chiffres montrent qu’il n’y a pas de clusters dans les écoles vaudoises.
Bien sûr, les enseignants ne sont pas au 1er rang de l’épidémie comme peuvent l’être les soignants.
Mais ils lui payent tout de même un lourd tribut avec un risque de contamination non négligeable.

  • Avec au moins 20 contaminations hebdomadaires d’enseignants, faudra-t-il généraliser le port du masque aux plus petits? 123 RF

    Avec au moins 20 contaminations hebdomadaires d’enseignants, faudra-t-il généraliser le port du masque aux plus petits? 123 RF

«Durant le mois de novembre, l’école a parfois tourné avec des remplaçants pas toujours formés. »

Gregory Durand, président de la Société pédagogique vaudoise

Le Département de la formation et de la jeunesse ne dispose des chiffres que depuis le mois d’octobre. Et ils sont assez évocateurs. Rien que pour la première semaine de novembre par exemple, 97 enseignants et collaborateurs ont été testés positifs à la Covid-19. Des chiffres probablement sous-estimés car établis sur la base des annonces volontaires par respect du secret médical, des enseignants et collaborateurs de l’école obligatoire. Et des chiffres à rapporter évidemment aux quelque 9500 enseignants sans compter les collaborateurs de l’école obligatoire vaudoise.

Mais il n’empêche. Même en nette régression à une vingtaine de cas par semaine depuis le mois de décembre - vacances obligent ? - ils montrent à quel point la profession d’enseignant est exposée. Pas autant que les soignants certes, mais bien plus que bien d’autres. Et pour cause: les enseignants sont exposés 5 jours par semaine à nos jeunes, très souvent asymptomatiques mais dont on sait qu’ils sont également des facteurs de transmission du virus.

Profession exposée

«Ces chiffres ne me surprennent pas, explique Gilles Pierrehumbert, président de la Société vaudoises des Maîtres secondaires, SVMS. Si on tient compte du fait que nous ne sommes pas soumis au télétravail, il me semble légitime de dire que nous sommes une profession relativement exposée en effet.»

Alors qu’en mars dernier, le confinement a eu pour conséquence le décrochage scolaire des enfants les plus vulnérables, ce sont donc aujourd’hui les absences des enseignants qui prétéritent leur avenir. «Il y a une crainte légitime de la part des enseignants en termes d’exposition à la Covid-19 et il appartient au Département de la formation et aux autorités sanitaires d’y répondre afin d’assurer la continuité des enseignements qui est la vraie priorité, observe Gregory Durand président de la Société pédagogique vaudoise. Durant le mois de novembre, l’école a tourné en dépit des absences d’enseignants, mais des fois avec des remplaçants pas toujours formés. Du point de vue pédagogique, nous n’avons certainement pas pu aller aussi loin qu’on le souhaitait».

Cora Antonioli, enseignante et présidente du Syndicat des Services publics-Vaud, fait le même constat: «Bien sûr que nous avons l’impression d’être exposés, même si le Département tient un autre discours. Nous ne sommes pas au premier rang comme les soignants, mais tout de même au 2e. Un article de la NZZ vient de révéler qu’à Bâle-Campagne, les enseignants sont 50% plus infectés que la population générale».

De fait, de nombreux enseignants appellent à un renforcement des mesures doutant de l’efficacité des dispositifs actuellement appliqués: «Emmener des troupeaux d’adolescents se laver les mains et veiller à ce qu’ils le fassent tous correctement, n’est pas toujours gagné, exprime ainsi avec scepticisme un enseignant du Nord vaudois. Cela demande une vigilance de tous les instants chaque jour et plusieurs fois par jour».

Renforcer les mesures

«Il faut être clair, dans certaines classes les distances ne sont jamais respectées car il y a trop d’enfants. Et puis que dire aussi de certains établissements où on dit se démasquer pour manger alors qu’il n’y a pas d’espace à disposition pour les repas», ajoute Cora Antonioli.

«Je ne suis pas sûr que les mesures actuelles comme l’aération des classes toutes les 45 minutes et le lavage des mains des enfants soient appliquées avec toute la rigueur voulue renchérit Gilles Pierrehumbert. Mais nous soutenons toute mesure qui peut renforcer la protection des enseignants et la prévention, car pour l’avenir des enfants, nous souhaitons que l’école demeure ouverte coûte que coûte», souligne-t-il. Parmi celles-ci, l’instauration de demi-classes d’enseignement ou la généralisation du port du masque pour les élèves plus jeunes sont régulièrement évoquées et pourraient être mises en place en cas d’aggravation de la pandémie.