Le long combat d’un Lausannois pour les chiens émotionnels

Au cours d’un voyage au Québec, Robert Fürst découvre l’existence des chiens de soutien émotionnel.

Adoptés par la police locale, le rôle de ces chiens est de venir en aide aux victimes.

L’idée qui fait des émules en France ou en Belgique semble avoir beaucoup de mal à trouver une oreille bienveillante chez nous.

  • Le rôle des chiens de soutien émotionnel est de venir en aide aux victimes de traumatismes d’homicides, d’accidents. 123 RF

    Le rôle des chiens de soutien émotionnel est de venir en aide aux victimes de traumatismes d’homicides, d’accidents. 123 RF

«Au Québec tout est facile. Ici tout est tellement compliqué!»

Robert Fürst

Le moins que l’on puisse dire est qu’il a de la ténacité et de la suite dans les idées. Et que, si l’on ose la comparaison, lorsqu’il tient son os, il ne le lâche pas. Depuis des mois en effet, Robert Fürst inonde les autorités de ses courriers et courriels. La conseillère d’Etat Béatrice Métraux, les municipaux Pierre-Antoine Hildbrand et David Payot, le chef de Centre de consultation pour les victimes d’infractions, le chef de la police cantonale, celui de la police de l’ouest lausannois, des communes de l’agglomération lausannoise, le service de protection de la jeunesse et puis, aussi, les journaux et médias de la région.

L’objet de son obstination? Pousser les services de police à s’assurer les services de ce que l’on appelle des «chiens de soutien émotionnel». Le rôle de ces chiens est de venir en aide aux victimes de traumatismes d’homicides, d’accidents etc, en les réconfortant, les apaisant, tout en atténuant les répercussions de l’uniforme policier, et en créant une diversion saine et positive à ce qui cause le stress. Une sorte de canino-thérapie qui aurait fait ses preuves sous d’autres latitudes, en particulier chez les enfants.

Kanak, au Québec

«J’ai découvert l’existence de ces chiens au cours d’un de mes innombrables voyages au Québec, explique Robert Fürst, qui, un jour au décours d’un burnout, a pu expérimenter les bienfaits d’une thérapie fondée sur les animaux. Là-bas, depuis 2016, la police de la ville de Sherbrooke, proche de Montréal s’est assuré les services d’un chien appelé Kanak.»

Ni une ni deux, notre homme prend contact et rencontre la Sergente-détective Mélanie Bédard, responsable de Kanak, avec lequel elle n’a pas moins de 304 interventions sur le terrain. «Si on présente un chien calme à une victime ou un témoin d’acte criminel qui est affecté par la situation, cela va nécessairement avoir un effet calmant et un effet positif sur ses émotions, nous explique-t-elle. Depuis toujours, le chien est le meilleur ami de l’homme et depuis longtemps, ils sont utilisés comme chien-guide pour les personnes aveugles ou comme chien d’assistance pour les personnes handicapées. Dans les dernières années, une panoplie d’utilisations du chien s’est développée. Par exemple, les chiens accompagnent des militaires vivant un état de stress post-traumatique ou auprès des enfants autistes. Plusieurs études scientifiques ont démontré, que par le simple fait de flatter un animal, on va y voir des effets bénéfiques sur l’humain, tant au niveau physiologique que psychologique, ce qui va donc réduire le stress, l’anxiété et même l’agressivité chez la personne qui le flatte». Et d’ajouter: «Au cours de nos interventions, chaque fois que le chien est présenté, des visages se détendent, un sourire apparaît et même des moments de rire de la part des enfants et des parents. Et puis, la présence du chien sert aussi à la justice car plusieurs victimes m’ont dit accepter d’aller témoigner à la cour et poursuivre leur cheminement judiciaire parce que le chien serait là.» Après une telle rencontre - au Québec l’accès aux autorités semble bien plus facile qu’ici», Robert Fürst murit son projet: faire découvrir aux autorités vaudoises l’existence et l’apport de ces chiens de soutien pour les victimes. Ceci d’autant que le concept semble essaimer progressivement en Europe, en Belgique, mais aussi en France, où le tribunal de Cahors, a accueilli il y a deux semaines un magnifique labrador dénommé LOL, son premier chien d’assistance judiciaire.

Fins de non recevoir

Seulement voilà, en Suisse, l’entreprise semble particulièrement ardue et les différentes autorités contactées se montrent très réticentes à un tel projet. Partout, il fait face à une indifférence polie. ☺«Indépendamment des bienfaits de ces chiens de soutien émotionnelle, la brigade canine de la Police municipale de Lausanne n’a pas vocation d’apporter un soutien psychologique aux enfants victimes ou aux enfants à problèmes», lui écrit ainsi en décembre dernier le municipal Pierre-Antoine Hildbrand.

«Tout au long de mes démarches, j’ai compris que je bousculais certaines habitudes, constate un rien dépité Robert Fürst, qui s’est même donné la peine de remplir un sondage facebook de la police de cantonale vaudoise destiné à améliorer les relations police-population. Mon but, uniquement, c’est de donner une chance à un chien de soutien émotionnel dans mon coin de pays et qui pourra venir en aide à bien des gens. C’est incroyable comme au Québec, même quand on est un étranger comme moi, il est facile d’avoir accès aux autorités qui partout vous reçoivent avec gentillesse et ouverture. Ici par contre, tout semble tellement difficile!»