Ces Lausannois qui ont fait le choix de vivre sans voiture

MOBILITE • La proportion d’habitants ne possédant pas de voiture est en augmentation ces dernières années. Certains d’entre eux nous expliquent ce choix.

Nicolas Palazzo, mécanicien

La guerre en Ukraine et la flambée des prix à la pompe qui s’en est suivie pourraient accentuer le phénomène. Que ce soit par conviction environnementale, car dénicher une place de parc près de chez eux relève du défi usant à relever au quotidien, ou simplement car les transports publics sont parfois plus pratiques et moins chers, de plus en plus de Lausannois ne possèdent pas de voiture.

Nicolas Palazzo est du lot. Quand sa voiture l’a lâché en 2013, ce mécano de 31 ans n’en a pas racheté car il n’en avait pas les moyens au début puis par conviction écologique. Au quotidien, ce jeune papa se déplace à vélo: «C’est plus rapide, plus efficace et moins stressant même si les automobilistes se montrent de plus en plus agressifs avec nous autres cyclistes.» Quand sa famille en a besoin, le trentenaire emprunte la voiture de son père ou de sa belle-maman: «Notre choix nous fait parfois passer pour des extraterrestres et suscite parfois des débats clivants… Mais il nous offre aussi le luxe de vivre plus lentement...»

Avec écologie mais sans donner des leçons

Nicolas Dubois n’a quant à lui jamais eu de voiture mais emprunte ponctuellement celle de sa mère. Le reste du temps, cet éducateur de 40 ans, féru de yoga et de spiritualité, se déplace à pied, à vélo ou en transports publics «par souci d’écologie notamment mais sans se poser en donneur de leçons». La voiture électrique? Il n’y croit pas trop rappelant que son bilan écologique est pour l’instant loin d’être meilleur que les modèles essence de dernière génération. Pour lui, moins les gens auront de voitures et plus les transports publics se développeront. «Je préfère travailler un peu moins et gagner un peu moins mais vivre un peu plus. Même sans voiture!»

Sa colocataire Pauline Regamay, elle non plus, n’a jamais possédé de voiture. L’enseignante de 35 ans a toujours eu la chance de travailler au centre-ville. Pour elle, se déplacer en transport public représente un gain de temps et d’argent. Elle n’a pas à chercher de place de parc ni à payer d’assurance, de taxe auto ou d’essence et profite de ses trajets pour abattre des tâches administratives. Pour ce qui est des courses en revanche, elle concède que c’est parfois difficile sans véhicule. «Mais moins on a de choses et plus on est libre», positive la Lausannoise. Laquelle voit d’un bon œil l’ambition de la Municipalité de faire de Lausanne la première ville du pays sans voitures à essence/diesel d’ici 2030.

Une organisation privilégiée

Le municipal PLR Pierre-Antoine Hildbrand a le permis, mais pas de voiture. Son épouse et lui ont pourtant deux enfants de 11 et 14 ans ce qui rend leur choix d’autant plus exigeant du point de vue de nombre d’autres parents. «Nous avons le privilège d’avoir toujours habité à cinq minutes d’une station de métro et de travailler en ville. Nos trois premiers logements n’avaient pas de place de parc alors on a fait sans voiture de manière plus pragmatique que militante. Ce mode de vie nous oblige à réfléchir à deux fois à nos loisirs et à faire nos courses au centre. Et nous sommes bien conscients que tout le monde ne peut pas s’organiser ainsi…»

Effectivement! Depuis qu’ils ont quitté Lausanne pour Croy et surtout depuis que leur fille est née, Julien Mermoud et sa femme Nathalie ont dû se résoudre à acheter un SUV. «La Suisse a un des réseaux de transports publics les mieux développés du monde mais quand on doit jongler avec son travail, des horaires de crèche et une poussette, être motorisé s’impose surtout que Mobility est trop cher quand on a des revenus modestes », conclut le visual merchandiser.

360 voitures pour 1000 Lausannois

En 2020, d’après l’observatoire de la mobilité lausannoise, la capitale vaudoise comptait 360 voitures pour 1000 habitants. Selon le micro-recensement de 2015, la part des ménages lausannois sans voiture était déjà de 46 % à l’époque contre 21 % à l’échelle du canton. Depuis 2011, d’après l’Office fédéral de la statistique, les villes suisses de plus de 100’000 habitants enregistrent une baisse constante de ce taux de motorisation. En 2021, l’OFS dénombrait près 4,7 millions de voitures de tourisme en Suisse. Soit 541 pour 1000 habitants. Parmi elles, on trouvait 4,4 millions de véhicules à essence ou diesel et 270’000 hybrides ou électriques. Les voitures 100% électriques représentent 1,5% du parc mais sont en constante augmentation depuis 2006, date de leur entrée dans la statistique. Le nombre de voitures n’a cessé d’augmenter dans notre pays depuis le lancement de la statistique en 1960. A l’époque, elle était de 509’000 mais la population n’était que de 5,5 millions contre 8,7 aujourd’hui. A Lausanne en 2019, 4% des voitures étaient hybrides ou électriques et ce chiffre montait à 13% pour les nouvelles immatriculations.