«Avant de pouvoir joindre quelqu’un, j’ai dû appeler au moins 200 fois»
Une cliente insatisfaite
Qui dit la vérité: les indépendants et les PME qui estiment avoir été induits en erreur, ou localsearch qui parle de «malentendu» et «d’erreur de communication», avant d’admettre qu’une petite minorité de ses vendeurs pourrait éventuellement «avoir dit des choses pas tout à fait justes», selon les termes de son porte-parole interrogé par nos soins?
Rappel des faits. En Suisse alémanique, la filiale de Swisscom localsearch est sous le feu des critiques depuis au moins 2016. Les médias parlent de pratiques commerciales agressives et «peu sérieuses». Notre enquête sur Genève et Vaud montre qu’elles ont également été utilisées dans ces deux cantons. Le scénario semble avoir été bien rodé: un vendeur de localsearch contacte un indépendant ou un entrepreneur déjà abonné pour l’informer d’un «changement de système interne». Le client demande si cela va changer son contrat et, comme on lui assure que non, il répond que ça lui est égal. Sans le savoir, il vient d’accepter un nouveau contrat qui lui coûtera au moins deux fois plus cher. A réception des factures suivantes, croyant à une erreur de localsearch, il refuse de payer et se retrouve menacé de poursuites.
Plusieurs variantes
Notre enquête, incluant de multiples contacts avec l’entreprise, montre que le scénario a connu quelques variantes. Ainsi, au printemps de cette année, une indépendante a été contactée par lettre. Comme le courrier ressemblait à une publicité, elle a failli le jeter à la poubelle, mais elle s’est ravisée et a découvert en le lisant attentivement que, sans opposition de sa part, le coût de son inscription passerait de 39,95 à 64,95 francs par mois. La cliente appelle donc localsearch. «Avant de pouvoir joindre quelqu’un, j’ai dû appeler au moins 2o0 fois – je le sais, parce que j’ai utilisé mon téléphone portable et que le nombre d’appels s’affiche automatiquement. Cela m’a pris des heures.» Autre cas de figure: à Genève, la marbrerie Saint-Georges s’est vu refiler il y a quelques années un abonnement d’une durée de trois ans, alors qu’elle croyait s’engager pour une année seulement. La même mésaventure est arrivée en 2016 au Théâtre Kléber-Méleau (TKM) à Renens. Le TKM se plaint d’avoir reçu des factures libellées de manière incorrecte, puis un dernier rappel avant poursuites, alors qu’on ne lui avait jamais adressé de rappel auparavant.
Numéros différents
Dans un autre cas que nous avons examiné, la cliente possédait curieusement deux numéros de client différents. Explication d’un vendeur de localsearch: «C’est parce que l’inscription de base, qui est gratuite, génère automatiquement un numéro de contrat ainsi qu’un numéro de client, et que les inscriptions suivantes – par exemple, l’ajout d’une adresse mail – génèrent aussi de nouveaux numéros, qui s’ajoutent au premier.» Et d’ajouter: «C’est vrai que ce serait plus simple d’avoir un seul numéro. Parfois, j’en tape un et je ne trouve pas le dossier, puis j’en tape un autre et ça fonctionne. Je ne vous cache pas que cela me complique la tâche.»
Invité le 17 septembre à s’exprimer dans l’émission A Bon Entendeur, le directeur de localsearch Stefano Santinelli s’est voulu rassurant: les abonnés n’ont pas à craindre d’être poursuivis s’ils n’ont pas donné suite à un courrier mentionnant un changement automatique de contrat car, dans ce cas, le changement n’aura tout simplement pas lieu. Pourtant, les clients concernés ont récemment reçu un courrier intitulé «premier rappel de paiement», avec une date limite laissant plutôt penser qu’ils ont de quoi s’inquiéter. Localsearch se défend en jurant qu’il ne s’agit pas d’un rappel au sens juridique du terme. Et le côté cavalier de la procédure témoignerait du désir de localsearch d’offrir à ses clients la solution la plus performante pour qu’ils puissent rester au goût du jour...