«La mobilité, c’est une problématique complexe qui dépasse les frontières communales.»
Xavier de Haller, conseiller communal PLR
Sur le territoire lausannois quelque 40 zones 30 km/h ont été aménagées depuis 1993. On les trouve tout aussi bien au centre-ville que dans certains quartiers destinés à l’habitation ou à la détente. Pour les partis de gauche - PS et POP, alliés aux Verts -, c’est toutefois insuffisant. Le 11 mai dernier, alors que Lausanne entamait la première étape de son déconfinement, ils déposaient en commun un postulat pour que l’instauration du 30 km/h soit étendue, de jour comme de nuit, à tout le territoire lausannois. «La crise du Covid-19 a métamorphosé la ville qui est devenue soudain plus tranquille en termes de bruit, grâce à la diminution du trafic motorisé», soulignaient-ils. «La baisse de la pollution sonore a eu comme conséquences positives d’améliorer le sommeil des Lausannois».
Forts de ce constat, et se basant sur les expériences de limitation de vitesse à 30km/h la nuit menées à l’avenue Vinet et à l’avenue de Beaulieu entre 2017 et 2019, ils demandaient ainsi que cette solution «peu coûteuse puisqu’elle ne nécessite pas d’aménagements particuliers, hormis la pose de panneaux de signalisation aux carrefours», soit instaurée. A leurs yeux l’uniformité de la limitation de vitesse permettrait de faciliter son respect en éliminant l’ambiguïté créée par les zones différenciées 50 et 30 actuelles.
De la poudre de perlimpinpin
Cette démarche fait cependant tiquer l’opposition. «Venant des Verts et de l’extrême-gauche, elle ne me surprend pas vraiment. Elle fait partie de leur fonds de commerce. Venant du PS un peu plus, à moins qu’il ne s’agisse que d’un coup électoraliste, de la poudre de perlimpinpin, qui vise notamment à satisfaire sa clientèle bobo des quartiers sous-gare», commente un brin ironique le conseiller communal PLR Xavier de Haller. Avant de préciser sa pensée: «La mobilité, c’est une problématique complexe qui dépasse les frontières communales. Son principe de base, c’est celui de la multimodalité, une approche avalisée par la Confédération dans le cadre du projet FORTA (Fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération, ndlr) et qui a le soutien du Canton de Vaud et de sa présidente. Cette démarche est donc inconséquente, notamment par rapport aux exigences d’accessibilité des villes voulues par le Canton». L’élu PLR dit comprendre d’autant moins le forcing opéré par les partis de gauche qu’il a fallu «deux ans d’études, d’équilibres à trouver ainsi que des mesures d’accompagnement», pour parvenir à un accord sur le 30 km/h de nuit. «La mesure n’est pas encore entrée en vigueur et voilà que la gauche veut l’étendre. Ce n’est pas acceptable!»
Des mesures contre-productives
Même son de cloche du côté du Touring Club Suisse (TCS) pour qui cette proposition est incongrue. Il tient ainsi à rappeler que s’il a toujours été en faveur des zones 30 dans les quartiers résidentiels, il est par contre opposé à la généralisation d’une limitation à une telle vitesse dans sa globalité, les axes principaux devant à ses yeux, rester par vocation, des axes de transit. «Pour faire respecter un 30 km/h sur l’un de ces axes, il faut par exemple installer du mobilier urbain pour faire ralentir les véhicules», note sa porte-parole Hélène Isoz. «Dans la réalité, cette mesure a un effet contre-productif. Car pour passer un modérateur, les véhicules doivent freiner, puis accélérer. Cela crée plus d’émission de CO2.» Plus de pollution donc et, paradoxalement, du bruit supplémentaire qui viendrait annuler l’effet escompté de diminution des nuisances sonores grâce à la réduction de vitesse. Et Hélène Isoz d’en rajouter une couche: «Certaines villes ont tardé à installer des revêtements phonoabsorbants, préférant la solution plus simple de la limitation de vitesse. Mais ajoute-t-elle, il n’y aura pas de réelle baisse des émissions sonores sur les grands axes de transit sans de tels revêtements». Pour le TCS, c’est en tous cas l’option la plus efficace pour réduire ces émissions, même si d’autres solutions peuvent également s’imposer, comme la pose de fenêtres anti-bruit ou de parois, là où cela est possible.
A ces aspects techniques s’ajoutent des règles très strictes en matière de réduction de vitesse sur les routes. Elles sont contenues dans l’Ordonnance sur la circulation routière (lire encadré ci-contre) et précisent très clairement quelles sont les conditions pour qu’une vitesse soit abaissée et quel est le niveau de compétences des Municipalités en la matière. Autant dire qu’à Lausanne, le 30 km/h partout, de jour comme de nuit, n’est pas pour demain!