Elections fédérales: Quand les partis vaudois voient la vie en vert

Greta Thunberg, canicule, fonte des glaciers, urgence climatique: jamais les problématiques écologiques n’ont autant occupé les agendas politiques. A l’occasion des élections fédérales, nous avons demandé aux principaux partis vaudois de nous préciser les 3 mesures écologiques prioritaires qu’ils veulent défendre lors de la prochaine législature. Avec un constat: l’écologie n’est plus cantonnée aux Verts, jadis bien seuls, et tous les partis ont leurs idées sur la question.

Petit florilège.

POP: pour une écologie sociale par le bas

Le POP a présenté un plan climatique pour assurer une véritable transition écologique en s’attaquant aux grands pollueurs et destructeurs de la planète, et cela sans passer par des taxes antisociales. Voici ses 3 mesures phares:

1. Pour la souveraineté alimentaire, des mesures visant à garantir le rôle nourricier de l’agriculture suisse en réduisant les volumes d’importations et en garantissant de bonnes conditions de travail pour les paysan-ne-s.

2. Un plan progressif de désinvestissement des énergies fossiles, autant pour les sociétés gérant le portefeuille de fonds publics que les sociétés privées afin de privilégier une politique d’investissement dans les énergies renouvelables.

3.Sanctions pénales contre la pollution industrielle: L’introduction du terme « écocide » dans le Code pénal permettrait que les atteintes graves à l’environnement soient poursuivies pénalement.

Verts libéraux: avions, véhicules électriques et bâtiments

En Suisse, le chauffage des bâtiments et de l’eau chaude sanitaire utilise presque 50% de toute l’énergie que nous consommons et représente donc un énorme potentiel d’économie et de réduction d’émission de CO2 . Il est donc essentiel de continuer le programme bâtiment, ce que refusait, malheureusement, la majorité dans la loi sur le CO2.

La mobilité individuelle reste un gros émetteur de CO2. Il faut favoriser les véhicules électriques ou à hydrogène mais il faut aussi offrir plus d’opportunités permettant de parquer son véhicule pour emprunter les transports publics. Le financement de telles mesures peut se faire par un juste prix sur l’essence. Finalement une taxation sur les billets d’avion. La taxe sur un vol Genève-Paris doit être maximum car il existe une alternative économique et pratique. Par contre, un vol transatlantique sera moins taxé car il n’existe pas d’alternative.

Socialistes: Investir pour se libérer du pétrole

Notre objectif, c’est que la Suisse ne brûle plus une goutte de pétrole d’ici 2045. Voici les 3 mesures les plus importantes de notre Plan Marshall pour le Climat qui nécessite de consacrer 2% des richesses annuelles de la Suisse à ces projets.

1. Isoler les bâtiments et remplacer les chauffages à mazout et au gaz par du renouvelable. La Confédération doit soutenir ces investissements privés, en particulier si le propriétaire s’engage à ne pas augmenter le total “loyer + charges” après la rénovation.

2. Passer rapidement à la mobilité électrique. La future Banque publique pour le climat doit octroyer des prêts sans intérêt pour faciliter l’achat d’un véhicule électrique. Le gros de cette électricité proviendra du solaire.

3. Interdire aux banques, aux assurances et aux caisses de pension d’investir dans le pétrole et le charbon.

PLR: Mobilité, bâtiments et procédures

Le PLR Vaud veut une politique qui ne s’arrête pas à des moratoires et des interdictions. Il est pour le développement de grands projets d’infrastructures et la production d’énergies renouvelables. En trois points, nos priorités sont :

En matière de transports, la mise en œuvre de A à Z de la «Croix fédérale de la mobilité» (qui doit permettre une meilleure attractivité du train et une diminution du transport par la route, plus polluant) et la promotion des modes de transports innovants.

L’efficience énergétique des bâtiments ensuite. Pour le PLR Vaud, l’administration doit montrer l’exemple en matière d’autonomie électrique des bâtiments publics, sans compter des mesures d’encouragement pour le privé.

Enfin, afin que les grands projets en lien avec l’urgence climatique puissent être rapidement mis en œuvre, nous voulons raccourcir les procédures et les délais de recours.

Les Verts: Mobilité douce et énergies renouvelables

Voici 3 sujets parmi une multitude d’autres dont il est urgent de se saisir pour répondre à l’urgence climatique :

1. Des investissements massifs dans les transports en commun et la mobilité douce, afin de proposer une alternative à la voiture pour les trajets pendulaires comme pour les loisirs (les transports sont responsables de 32% des émissions de CO2 en Suisse)

2. Accélérer la rénovation énergétique des bâtiments et le remplacement des chauffages à mazout ou au gaz par des énergies plus propres (les bâtiments et leur chauffage sont responsables de 26% des émissions de CO2 dans notre pays)

3. Pousser les acteurs financiers à désinvestir des énergies fossiles et à privilégier les investissements dans les énergies renouvelables (la place financière suisse est responsable de près de 20 fois plus d’émissions que celles émises en Suisse chaque année).

UDC: Pragmatisme et responsabilité individuelle

L’UDC a toujours priorisé la responsabilité individuelle plutôt que la mise sous tutelle des citoyennes et des citoyens et se bat contre toute nouvelle taxe et en faveur de mesures concrètes et efficaces. Une première mesure reste la diminution de l’immigration incontrôlée qui détruit nos espaces naturels en bétonnant la Suisse. Ce sont plus d’un million de personnes qui ont immigré en Suisse en l’espace de treize ans! Deuxièmement, il faut revenir à une consommation locale et cesser les importations inutiles. Empêchons la gauche de détruire l’agriculture suisse en la criminalisant et augmentons notre taux d’auto-approvisionnement. Enfin, nous nous engageons pour le développement de solutions durables grâce aux nouvelles technologies et à l’innovation. Arrêtons de jouer la carte émotionnelle et mettons à profit le savoir-faire suisse pour apporter des solutions viables.

PDC: Une loi et une journée pour le climat

1. Une loi sur le CO2 efficace: Le PDC veut atteindre l’objectif de l’Accord de Paris. Pour cela, il faut réduire nos émissions de CO2 de 50% d’ici 2030. Le PDC est favorable: à une taxe sur les billets d’avion ; à une augmentation plafonnée du prix du carburant adaptée aux régions périphériques ; aux aides pour l’isolation des bâtiments.

2. Une consommation d’énergie durable: il faut des incitations efficaces pour développer les énergies renouvelables et assurer un approvisionnement en électricité sûr. En outre il faut promouvoir des solutions propres: technologies économes en énergie, économie circulaire, production locale, lutte contre l’obsolescence programmée.

3. Une journée populaire en faveur du climat: Une journée populaire pour le climat permettra de renforcer la prise de conscience collective (Postulat PDC au Grand Conseil ).

Ensemble à gauche: pour une décroissance juste et solidaire

Il est illusoire de prétendre résoudre la crise climatique sans s’attaquer au système capitaliste qui en est la cause. Nous défendons une politique écologique basée sur le principe de justice climatique. Toute mesure environnementale doit contribuer à réduire les inégalités sociales et conduire à une meilleure répartition des richesses. Nous proposons :

1. de mettre à contribution en priorité celles et ceux qui causent et profitent des émissions de gaz à effet de serre selon le principe du pollueur-payeur pour créer un Fonds climat qui financera la transition écologique;

2. de diminuer d’ici 2024 les émissions de gaz à effet de serre de la Suisse d’au moins 50% par rapport à 1990 et d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2030, sans avoir recours à des mesures de compensation;

3. de mettre un frein aux atteintes à l’environnement pratiquées par les multinationales dans les pays du Sud.

Du vert à toutes les sauces, l'éditorial de Philippe Kottelat

Combien étaient-ils samedi dernier à Berne: 50 mille, 70 mille, 100 mille? Peu importe! Ce qui est sûr, c’est qu’ils étaient nombreux, très nombreux même. Jamais auparavant en Suisse, autant de personnes n’étaient descendues dans la rue pour la protection du climat.

Des concerts, des chants, des discours et des revendications: la nécessité d’une politique cohérente, avec la sortie du charbon, du pétrole et du gaz - y compris pour la place financière suisse -, ainsi qu’une véritable justice climatique. «En 50 ans, les puissants ont imposé le fric pour faire marcher le monde et faire croire au bonheur par la consommation», a dénoncé le Prix Nobel de chimie Jacques Dubochet. Le message induit est clair: il est temps de changer de paradigme.

Cette action de masse au niveau suisse n’est que la suite logique de ce qui se passe au niveau planétaire à la suite des appels lancés par la jeune Suédoise Greta Thunberg. Elle corrobore en tous cas ce que tous les sondages disent: jamais les questions écologiques n’ont autant préoccupé la population et, corollaire, les agendas politiques. A un peu plus de deux semaines des élections fédérales, le vert est devenu la couleur dominante de tous les partis politiques. Sans exception! C’est aujourd’hui à qui lavera plus vert alors qu’hier encore beaucoup, contrairement à ce qu’ils affirment, n’avaient aucune fibre écologiste.

Mais comment laver plus vert? Quelles sont les mesures prioritaires que chaque parti entend soutenir lors de la prochaine législature? C’est ce que nous avons voulu savoir (lire en page 7). Leurs réponses sont multiples. Et montrent clairement leur capacité d’adaptation à la réalité en cours, tout en restant cantonnés dans la défense de leur propre fonds de commerce.