«Dépister le VIH, une marque de responsabilité»

DéPISTAGE • Le 30 novembre prochain, une journée de dépistage gratuit et anonyme du VIH sera organisée à Lausanne. Le point avec le Professeur Matthias Cavassini, responsable de la consultation ambulatoire «Maladies infectieuses» au CHUV.

  • Pr Matthias Cavassini, responsable de la consultation en maladies infectieuses du CHUV et enseignant à l’UNIL. CA

    Pr Matthias Cavassini, responsable de la consultation en maladies infectieuses du CHUV et enseignant à l’UNIL. CA

Est-il facile de se faire dépister aujourd’hui?

En termes de lieux de dépistage, le canton de Vaud est amplement pourvu. D’autant qu’il est aussi possible de se faire dépister chez son médecin traitant ou même, depuis le mois de juillet, avec les autotests que l’on peut trouver en pharmacie. S’il est un obstacle pour le dépistage, c’est plutôt au niveau financier car les personnes qui se font dépister sur une base anonyme et de manière volontaire doivent payer le test, entre 60 et 70 francs. C’est pour cette raison que depuis 4 ans, le CHUV et la PMU (Policl.Med.Univ) proposent une journée de dépistage gratuit et anonyme à la population.

Qui doit se faire dépister?

Toute personne sexuellement active qui a des rapports non protégés! C’est très large mais il faut sortir de la représentation populaire qui veut que seuls les jeunes, les toxicomanes ou les homosexuels soient concernés. A titre d’exemple, nous avons régulièrement au CHUV des patients hétérosexuels de plus de 50 ans hospitalisés pour des sidas déclarés. Les jeunes ont intégré la culture du préservatif et du dépistage. Ceux qui y pensent moins ou pas du tout, sont les quadragénaires ou les quinquagénaires qui recommencent une vie et s’exposent au VIH. Or tant que le dépistage ne concerne pas le plus grand nombre, on continuera à avoir des diagnostics trop nombreux et trop tardifs, et l’épidémie continuera à se propager.

En quoi un dépistage le plus précoce possible est-il important?

Pour la personne infectée, plus le diagnostic est précoce et meilleur sera le pronostic. Ensuite parce que grâce au traitement, une personne infectée ne peut plus contaminer! C’est une réalité: un contact sexuel avec une personne séropositive sous médicaments comporte moins de risque de transmission qu’avec une personne qui se croit séronégative mais qui est infectée! Au final, seul le recours combiné du préservatif, au traitement des personnes séropositives et à la PREP (Prophylaxie pré-exposition) permettront d’enrayer l’épidémie.

Combien de personnes se font-elles dépister au cours de cette journée?

Depuis qu’on a lancé ces journées, l’engouement est croissant. On a commencé avec plus de 700 personnes dépistées, il y a trois ans, et dépassé la barre des mille l’année passée. 98% des personnes testées sont négatives, et celles qui le souhaitent peuvent obtenir un certificat de séronégativité. Faire un test, même lorsque l’on est en couple n’est pas un signe de manque de confiance mais une marque de responsabilité individuelle et de couple.

Comment expliquez-vous que si peu de personnes - 300’000 par an en Suisse - aient recours au dépistage?

Pour les raisons évoquées ci-dessus, car les personnes pensent que l’infection est circonscrite aux mêmes groupes, jeunes toxicomanes et homosexuels. L’autre raison est que contrairement aux années 90 qui étaient militantes, plus personne n’affiche sa séropositivité. Le VIH demeure donc un grand tabou et le combat n’est pas encore gagné.

Propos recueillis par Charaf Abdessemed

Journée de dépistage VIH gratuit et sans RDV. Le vendredi 30 novembre, à la Gare de Lausanne (Pharmacie Sun Store et bus), à la Policlinique Médicale Universitaire, à la Permanence PMU du Flon, au Point Santé de l’EPFL et à l’Accueil Santé de l’UNIL.