Alter Start Food, un tremplin professionnel pour les migrants

ENTREPRENEURIAT • Alter Start Food est un programme qui vise à soutenir les migrants dans la création de leur entreprise de restauration. Coup de projecteur sur un concept solidaire dont l’actualité ukrainienne confirme la pertinence.

Mardi à 10h30, dans des locaux lumineux de la Croix-sur-Lutry avec vue sur le lac, chefs cuisiniers et aides bénévoles s’activent. Nous nous trouvons dans la cuisine professionnelle d’Alter Start Food, un programme créé en 2020 par l’International Foundation for Population and Development (IFPD). Le but: accompagner les personnes issues de la migration dans la création de leur propre entreprise culinaire. Ils bénéficient d’un cadre où l’accent est mis sur la formation et la professionnalisation, sous la responsabilité de Jérôme Binder, fondateur et directeur de Parfum d’Epices à Crissier et responsable du programme Alter Start Food.

Cuisine du monde

Les chefs cuisiniers qui y travaillent viennent d’Algérie, du Tibet, d’Arménie, d’Erythrée, de Mongolie, de Syrie, d’Afghanistan ou encore du Sri Lanka. Ils sont une dizaine au total. Lorsque nous nous rendons sur place, quatre sont présents; Mourad, chef algérien et Dawa, cheffe tibétaine. Ce sont eux qui mènent la danse cette semaine. Tajine d’agneau aux fruits secs et momos (raviolis tibétains) sont au menu. Mardi, c’est jour de production. Le lendemain, près de 300 personnes recevront leur repas chez eux ou sur leur lieu de travail. En plus du service de livraison à domicile, le programme propose un service traiteur qui comptabilise entre dix et quinze demandes par mois. Tsetseg, de Mongolie, et Riham, d’Erythrée, également cheffes, sont aujourd’hui présentes en aide.

Perspectives encourageantes

Dans le cadre du programme, les entrepreneurs sont accompagnés dans les démarches administratives de création de leur propre commerce. Mené en partenariat avec l’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM), le programme vise à rendre les bénéficiaires indépendants financièrement. Ce que confirme avec force Mourad: «J’aimerais sortir de l’aide sociale et trouver du travail. Mais ce n’est pas facile.» Agent de protection civile en Algérie, Mourad n’a pas pu reprendre ce métier en Suisse en raison de son âge. Aujourd’hui, il finalise un service de sandwicherie mobile à Genève, et se réjouit d’avoir déjà pu discuter avec de nombreux partenaires intéressés. Dawa, de son côté, possède déjà un réseau d’habitués, puisqu’elle tient des stands depuis cinq ans dans diverses manifestations neuchâteloises avec son mari, un pâtissier-confiseur. Un atout pour l’ouverture de leur restaurant tibétain, qui est planifié au mois de juin.

Avec l’afflux de migrants venus d’Ukraine, le programme pourrait-il bientôt compter sur un chef ukrainien? «Nous n’en avons pas pour le moment, mais le statut des réfugiés devait être clarifié car il est indispensable qu’ils possèdent une autorisation de travailler, détaille Jérôme Binder. Nous sommes évidemment ouverts aux migrants de toutes les origines.»