Il y a ceux que l’on coupe en petits morceaux dans un consulat, et il y a ceux que l’on fait disparaître proprement et en toute simplicité. C’est finalement la différence entre le travail à la saoudienne et le travail à la chinoise. L’un est rustre, fruste, à la bédouine, l’autre aussi «raffiné» que Confucius. Mais dans les deux cas, le résultat est le même.
Qu’il s’agisse du journaliste Jamal Khashoggi purement et simplement démembré à l’intérieur du consulat saoudien à Istanbul il y a trois ans, ou de la joueuse de tennis chinoise Peng Shuai récemment évaporée de la surface de la terre parce qu’elle a eu l’outrecuidance de croire que #MeToo pouvait s’écrire en mandarin, puis gauchement réapparue à la faveur de la mobilisation internationale dont elle a fait l’objet, les gêneurs sont purement et simplement supprimés, par le fait du prince, qu’il soit arabe ou rouge.
Alors, pour ceux qui sous nos latitudes hurlent à la dictature, ou même en rêvent à mots feutrés, la leçon mérite d’être méditée: ni eux, parce qu’ils sont vent debout contre la loi covid, ni Alain Berset parce qu’il la soutient activement, ne feront l’objet d’une lettre de cachet qui conduira à leur disparition ou leur assassinat sauvage sans autre forme de procès.
Aussi imparfaites soient-elles, nos démocraties connaissent la liberté d’opinion, l’habeas corpus, le droit de vote et la séparation des pouvoirs qui mettent chacun d’entre nous à l’abri de l’arbitraire des puissants. Cela s’appelle l’état de droit qui d’ailleurs, nous oblige autant qu’il nous protège.
Et si nos parangons de démocratie et pourfendeurs de dictatures allaient aussi manifester devant les consulats saoudien ou chinois?