Mauvais jeu de mots pour des munitions

  •  Manon Schick, directrice d’Amnesty International Suisse

    Manon Schick, directrice d’Amnesty International Suisse

The Sniper’s choice: Le choix du sniper. C’est ainsi que la firme RUAG présente ses nouvelles cartouches de précision sur son site internet.

De quoi faire s’étrangler d’indignation tous les habitants de Sarajevo qui ont, pendant des années, vécu dans la crainte de se faire tuer en allant simplement faire leur marché ou chercher de l’eau potable sur Sniper alley, cette rue surnommée ainsi car 225 personnes dont 60 enfants y ont trouvé la mort pour la seule année 1995.

Bien sûr, on trouve des snipers, des tireurs d’élite, dans la plupart des armées du monde, mais il existe aussi des «indépendants» qui, hors du contrôle de leur hiérarchie, deviennent des criminels de guerre lorsque, comme dans l’ex-Yougoslavie ou en Afghanistan, ils s’attaquent à la population civile. Visiblement, RUAG ne craint pas l’amalgame et n’hésite pas à les désigner comme des clients privilégiés.

La firme bernoise qui, rappelons-le, est entièrement dans les mains de la Confédération, n’en est pas à son ballon d’essai dans la mauvaise gestion de la communication: elle a par exemple toujours refusé d’expliquer comment l’on pouvait retrouver ses munitions sur les champs de bataille libyens ou ses grenades en Syrie.

Apparemment, le sens de l’éthique n’est pas la qualité première de cette entreprise. C’est regrettable. RUAG porte atteinte à la réputation de notre pays. Le Conseil fédéral, interpellé sur le slogan associé à ces munitions, ne veut pas commenter les activités «opérationelles» de la société. Il suggère toutefois un minimum de retenue en matière de publicité pour du matériel de guerre. On aurait pu attendre de lui une attitude plus ferme et un rappel à l’ordre. Ne serait-ce que par respect pour les victimes de Sniper alley.