Le «tombeur» de Vuilleumier

- Démissionnaire (d'une partie!) de son dicastère, Marc Vuilleumier en impute explicitement la responsabilité au syndic Brélaz.
- Au cœur de l'été, le «géant vert» n'a en effet pas hésité à monter au créneau, et tacler la politique sécuritaire menée par son collègue.
- Vieux briscard de la politique, as du compromis pragmatique, Brélaz se heurte à un ultime défi: réussir sa sortie sans trop de casse.

  • Brélaz-Vuilleumier, à l'origine d'une crise politique sans précédent.

    Brélaz-Vuilleumier, à l'origine d'une crise politique sans précédent.

POLITIQUE • Un géant, un génie, un puceau attardé comme il s'est plu à le faire savoir dans les médias... Longtemps, Daniel Brélaz a fait figure, dans le champ politique lausannois, de personnalité iconoclaste, brillante, visionnaire, et... adorée des médias. Certes un peu surdimensionnée pour Lausanne (dans tous les sens du terme), mais clairement au-dessus du lot, servie par une intelligence d'une acuité exceptionnelle, longtemps plébiscitée par les Lausannois, séduits par son caractère exubérant, ses cravates, ses bretelles et... les régimes de Marie-Ange.Seulement voilà. Sous ses dehors bonhommes de nounours de la politique, adepte de la turbosieste, se cache un politicien redoutable et retors, dont les cibles politiques ne se comptent plus. Car même assoupi, le félin est capable de décrocher une patte assassine. Dernière victime en date, Marc Vuilleumier qui, ulcéré par les acerbes critiques portée en juillet dernier par son collègue du Municipal, vient de décider, fait inédit, de se démettre du volet «police» de son dicastère.

Un boulet

La réunion en urgence du collège municipal mardi (lire brève ci-contre) démontre à souhait l'ampleur de la crise née de cette «démission». Ce dernier a donc décidé de confier la tâche au socialiste Grégoire Junod. Daniel Brélaz n'a donc finalement pas hérité de cette mission, sur laquelle il a «à l'insu de son plein gré», avancé ses pions. Longtemps, ses ennemis politiques ont déploré son agressivité un tantinet hautaine pour ceux qui ne partageaient pas ses idées ou... son intelligence. Aujourd'hui, ce sont ses amis, qui mezza voce n'hésitent plus à remettre en question le patriarche.Il y a quelques mois, un membre influent des Verts lausannois, nous avouait ainsi en privé à quel point le géant vert représentait désormais «un boulet» pour son parti, ulcéré par sa double ambition locale et fédérale. «L'enjeu pour nous aujourd'hui se résume à savoir comment faire partir Brélaz», nous étions-nous entendus confier. C'est dire si le premier écologiste à siéger au Conseil national, - c'était en 1979! -, s'apparente de plus en plus au célèbre sparadrap du capitaine Haddock.

Calculateur

Redoutable calculateur, l'homme sait mieux que quiconque peser les rapports de forces politiques et anticiper des victoires là où personne ne l'attendait, avec un sens du pragmatisme qui se dément rarement, laissant toujours une porte entrouverte pour un éventuel plan B.Aveuglé par son propre égo, le syndic le plus populaire qu'ait jamais eu Lausanne, tend à concentrer les pouvoirs au grand dam de ceux qui travaillent avec lui, qui avouent volontiers «se méfier de lui». Non pas que notre homme soit un autocrate, mais vraisemblablement parce qu'il est convaincu que lui seul a la capacité de faire avancer les dossiers. Aujourd'hui, celui que certains n'ont pas hésité à adouber comme le 8ème conseiller d'Etat du canton, se voit confronté à un ultime défi: réussir... sa propre mise à mort politique.

Un éléphant dans un magasin de porcelaine

CA • Tueur, Brélaz? «Pas vraiment», selon de nombreux élus qui l'ont côtoyé. «Le syndic est incapable de tuer et il n'y a pas d'instinct prédateur chez lui», ajoute-l'un d'entre eux. Et un autre de préciser: «Mais c'est un peu un éléphant dans un magasin de porcelaine: il fait des dégâts et ne se rend pas compte qu'il peut user et tuer des gens!», comme il l'a fait pour toutes les jeunes pousses de son parti, qui se sont crues autorisées, en vain, à revendiquer son héritage et... sa place.Ou comme, ce que l'on peut désormais appeler «la crise Vuilleumier», dans laquelle Daniel Brélaz a voulu empoigner un dossier épineux, avec pour dommage collatéral, une mise à mal sans précédent de la crédibilité de son collègue municipal. En cause, comme toujours, son intelligence, qui le conduit à s'incarner en homme providentiel, seul à même de régler certains dossiers, au point de le conduire à un certain «autisme», et de faire fi de l'avis, même autorisé, des autres. «Il est même arrivé que Brélaz ait dû couper certaines têtes, et il ne l'a pas fait», soupire même un autre.