Caisse publique: les 4 questions qui font débat

Selon le premier sondage SSR, les Romands seraient près de 55% à se prononcer en faveur de la caisse unique, contre 35% des Alémaniques. Pierre-Yves Maillard, responsable du Département de la Santé, est formel, tout se joue sur la «transparence» que mettrait en place l’initiative. Au-delà, reste à savoir si le OUI dans les urnes le 28 septembre aurait un impact sur le système de santé et sur ses coûts de manière générale…

  • Au centre des enjeux: la transparence et la maitrise des coûts. DR

    Au centre des enjeux: la transparence et la maitrise des coûts. DR

L’instauration d’une caisse publique ferait-t-elle vraiment baisser le coût des primes des assurés ?

Les opposants sont formels, un OUI ne garantirait pas une baisse des coûts de la santé. Quant à la réduction des primes, il s’agirait d’une baisse négligeable. Mauro Poggia, conseiller d’État en charge du département de la santé à Genève concède: «Dire que les coûts de la santé n’augmenteront pas grâce à la caisse publique serait trompeur et la caisse publique n’a pas pour vocation première de faire baisser les primes ». Toutefois, le fait de ne constituer qu’une seule caisse par canton permet de « légitimement considérer que les frais administratifs englobés dans nos primes diminueront ».

Selon Pierre-Yves Maillard, conseiller d’État responsable du département de la Santé vaudois, l’instauration d’une caisse publique aurait l’avantage de réguler le montant des primes pour qu’il soit représentatif des coûts. Ainsi, «si les coûts de la santé venaient à augmenter de 2%, les primes n’augmenteraient que de 2% et non de 14% (65 francs par mois) pour certains assurés comme ce sera le cas l’an prochain, selon les propositions de primes des assureurs».

La caisse publique laisserait-elle toujours le libre choix du médecin aux patients ?

Pour les opposants en cas de OUI, le nouveau système supprimerait le libre choix du médecin et imposerait au peuple le système du Managed Care refusé en votation en 2012. Pour Michel Matter, président de l’Association des médecins de Genève et ancien président du comité référendaire à la loi sur le Managed Care, «seule la caisse publique garantira dans la durée le libre choix du médecin dans l’assurance de base, tandis que les caisses n’ont de cesse de vouloir le supprimer pour le réserver aux assurances complémentaires: autrement dit, seuls ceux qui auront les moyens pourront choisir leur médecin. La qualité médicale doit être à la portée de toutes les bourses, dès l’assurance de base.» De plus, comme le souligne Mauro Poggia, «le libre choix du professionnel de la santé est garanti dans la LAMal» sans compter qu’avec l’instauration d’une caisse publique, «le fait d’écarter un médecin de la liste des fournisseurs remboursés par l’assurance maladie obligatoire, alors même qu’il serait habilité à pratiquer en Suisse, serait une atteinte inadmissible à sa liberté économique ».

Les patients se verront-ils rembourser leurs médicaments plus rapidement?

Les opposants soulignent qu’un système unique aurait des répercussions sur l’échéance des remboursements de médicaments que certains assurés aujourd’hui payent comptant à la pharmacie puis se font rembourser. Mauro Poggia est catégorique: «Il n’y a aucune raison de penser que les antennes cantonales de la caisse publique seraient plus lentes à rembourser les médicaments que les services de nos assureurs actuels, souvent installés hors du canton. D’ailleurs, la SUVA, active dans le domaine de l’assurance accidents obligatoire, n’est certainement pas plus lente que les assureurs privés actifs dans ce secteur.

 

La mise sur pied d’une caisse publique impliquera-t-elle une meilleure transparence de ses activités financières?

Ici, tous sont d’accord, le point fort de la caisse publique serait de créer une transparence aujourd’hui inexistante dans la gestion des comptes de l’assurance maladie. Comme le souligne Michel Matter, «les flux financiers dans les comptes des caisses sont opaques et il n’y a pas de réelle surveillance. Le scandale des primes payées en trop et de leur rétrocession très partielle en est un exemple. Les assurés romands ont été pris pour des dindons!» Pour Pierre-Yves Maillard, «la transparence est la condition pour que les primes des assurés d’un canton soient employées pour financer les coûts de la santé du canton en question ».

Pourquoi il faut voter non

ISABELLE MORET • La caisse unique est une idée. Mais pas la bonne pour réformer notre système de santé. Elle entend donner le monopole de l’assurance maladie de base à l’Etat, alors que la concurrence garantit diversité et libre-choix, elle veut instaurer une prime unique par canton, alors que chaque assuré - et chaque patient – a des besoins différents. Elle souhaite donner aux fonctionnaires, aux directeurs d’hôpitaux et aux patients le contrôle de la caisse étatique, alors que les conflits d’intérêts seront inévitables, paralyseront le système et engendreront augmentation de coûts. Elle intégrera des «programmes de soins», qui laissent présager une médecine coordonnée obligatoire sans libre choix du médecin, alors qu’il est question ici de maladie, et non de jambe cassée. A ma connaissance, on décide rarement d’être malade.

«Décider», c’est par contre le pouvoir que les Suisses possèdent (encore) dans le système actuel. Un libre-choix qu’un monopole comme la caisse unique pourra altérer. Voilà pourquoi la caisse unique doit être rejetée et les réformes en cours au parlement absolument poursuivies.

Isabelle Moret, Conseillère nationale PLR, vice-présidente du PLR Suisse

Pourquoi il faut voter oui

REBECCA RUIZ • Le débat sur la caisse publique est sur toutes les lèvres. L’enjeu est de taille, car il en va de ce que nous avons de plus précieux: la santé, dont on aime à dire qu’elle n’a pas de prix – mais qui nous coûte de plus en plus cher. Depuis l’an 2000, les primes ne cessent d’augmenter. Pire, elles explosent sans que cela corresponde à l’augmentation réelle des coûts de la santé, en raison de la chasse aux bons risques pratiquée par les assurances. Avec une caisse publique, le système de l’assurance maladie, si fondamental, deviendrait non seulement plus juste mais surtout beaucoup plus transparent .

Nous pourrions ainsi en effet comprendre comment les primes sont fixées. Nous saurions enfin où va notre argent, qui sera mieux utilisé s’il n’a pas à financer l’administration de plus de 60 caisses, et qui sera mieux investi dans la prévention que dans la publicité! Si nous voulons recouvrer la confiance en notre système d’assurance, si nous souhaitons mettre fin au cirque annuel de la recherche d’une prime qui ne grèvera pas notre budget , il est temps de corriger ce qui ne fonctionne pas. Le 28 septembre, votons dans notre intérêt à tous en disant oui à la caisse publique.

Rebecca Ruiz, Conseillère nationale PS