L'été de... Jacques Neirynck

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    Jacques Neirynck

Jacques Neirynck - Ancien professeur à l'EPFL, conseiller national

L'été est la chance de l'année. Non seulement on a droit à quelques vacances, mais aussi il fait beau. A peu près. Il y a toujours deux semaines de mauvais temps à défalquer de l'addition. Mais enfin il y a des journées ensoleillées, on peut arrêter le chauffage et manger en plein air. L'été est plus facile à vivre que le reste de l'année. Les gens sont plutôt de bonne humeur, même les grincheux de nature. Et surtout on s'arrête de travailler. On s'assied, on n'ouvre même pas le journal, on boit lentement l'apéritif les yeux dans le vague si l'on est seul, en échangeant des banalités si l'on est en compagnie. On n'a pas envie de se disputer. On répond «oui, oui» à n'importe quel propos incohérent. On dodeline de la tête. Et parfois on s'endort carrément.

Ah les siestes estivales ! Le soleil est au zénith, on est obligé de trouver un coin d'ombre, on bascule le transat pour avoir les pieds en l'air et on somnole en rêvassant à ce que l'on pourrait faire, à ce que l'on devrait faire: trier la paperasse qui s'est accumulée, tuteurer les plants de tomates, massacrer les mauvaises herbes du chemin avec de l'herbicide, cueillir les framboises ou les myrtilles. Puis on se réveille, il est déjà trois heures. On n'a rien fait. On découvre que c'est un plaisir et que l'on ne se sent même pas coupable.Il y a le souper, sur la terrasse. Du froid, du frais, de la salade, du melon, du jambon, du vin rosé. On écoute vaguement les informations du Téléjournal mais il ne se passe rien qu'une inondation au Japon ou l'arrivée du Tour de France. La Suisse toute entière est en congé. La politique s'arrête. Les journalistes transpirent pour meubler les temps morts. Et puis vient le film de la soirée. Un vieux western déjà vu dix fois. Ou une comédie française bas de gamme. Mais on est bon public. On reste jusqu'à la fin, pour le plaisir de n'avoir pas à réfléchir. Il est onze heures. On baille. Demain, il fera beau. On se couche. On s'endort. C'est l'été.