Vols à la pompe en hausse

Avec des prix flirtant avec les 2 francs le litre, l'essence devient un objet de convoitise.Depuis quelques mois, les voleurs d'essence se multiplient, surtout en fin de mois.La vidéosurveillance a un effet peu dissuasif sur certains malfrats qui n'hésitent pas à redoubler d'ingéniosité.

  • A chaque hausse du prix du caburant, les stations services enregistrent une recrudescence de vols à la pompe.

«A chaque hausse du prix du carburant, c'est la même chose: on observe une recrudescence des vols à la pompe», lance Michel*, un brin fataliste. Gérant de trois stations services sur l'arc lémanique depuis plus de dix ans, il a vu le phénomène prendre de l'ampleur. «A certaines périodes, surtout en fin de mois, nous enregistrons jusqu'à un vol par jour», affirme-t-il.Des chiffres que la police cantonale vaudoise ne peut pourtant pas corroborer. En effet, ce genre de délit est considéré par la loi comme un vol simple qui ne se poursuit que sur plainte. «Nous enregistrons une quarantaine de cas par année. Entre 2010 et 2011, nous n'avons pas constaté de hausse, mais ces chiffres ne sont pas représentatifs de la réalité, car tous les cas ne font pas l'objet d'un dépôt de plainte, confirme Christophe Sauterel, porte-parole de la police cantonale vaudoise. C'est regrettable, car la plupart des stations services sont maintenant équipées de caméras de surveillance. Elles disposent ainsi d'éléments de preuve qui facilitent la procédure».

A chacun sa méthode

Michel fait partie des gérants qui ont renoncé à poursuivre les malfrats. Il préfère les prendre sur le fait. Le dépôt de plainte représente, selon lui, trop de démarches administratives et une perte de temps: «Ces petites incivilités ne sont pas punies assez sévèrement. Cela ne dissuade pas les voleurs», affirme-t-il. Et de citer en exemple un braquage avec une arme dont il a été victime. «L'homme a été interpellé et confondu. Or, deux jours après, je l'ai croisé en pleine rue de Lausanne. Il était libre comme l'air». A l'instar d'autres gérants, Michel considère ces vols comme pertes et profits. «Sur une moyenne annuelle de 4 millions de litres vendus dans une station, j'en ai 4'000 qui sont volés, soit une perte de 7'000 francs environ», estime-t-il.Chez BP, les vols à la pompe restent rares, selon la responsable de communication, Isabelle Thommen: «Toutes nos stations sont équipées de vidéosurveillance ou sont situées dans des endroits bien visibles et éclairés. Cela dissuade sans doute les voleurs». Ceux qui s'y risquent néanmoins sont identifiés au moyen du numéro d'immatriculation de la voiture et se voient envoyer un courrier. «Dans cette lettre, nous leur signalons le délit et joignons un bulletin de versement avec le montant exact du forfait. Ils sont également avertis qu'en cas de non-paiement, ils seront dénoncés à la police», souligne Isabelle Thommen.

Pas de profil type

A Genève, les stations services ne sont pas toutes égales face à ce genre de délit. «En moyenne, nous enregistrons environ 5 vols d'essence par semaine dans le canton. Mais certaines zones, comme Meyrin, Perly et Plan-les-Ouates sont plus touchées. La frontière y est pour quelque chose. Avec des plaques étrangères, il est en effet plus difficile de poursuivre les voleurs», souligne Jean Krucker, président de l'Association genevoise des exploitants de magasins de stations service (AGEMS). Et pourtant, dans la cité de Calvin, 99% des stations services sont pourvues de caméras de surveillance… ce qui n'empêche pas les voleurs de redoubler d'ingéniosité pour ne pas se faire prendre (lire ci-contre).Michel, lui, préfère ne pas se fier aux apparences. Hommes, femmes, riches ou pauvres, les voleurs appartiennent à toutes les catégories de la population. «Chez les voleurs d'essence comme chez les autres malfrats, l'habit ne fait pas le moine! Ce sont même souvent des conducteurs de grosses berlines ou de 4x4 de luxe qui partent sans payer», assure le gérant. Il constate toutefois que les cas ont tendance à augmenter en fin de mois: «Certains se saignent pour financer le leasing de leur voiture mais n'ont plus d'argent pour la faire rouler ou pour manger!».

* nom connu de la rédaction

«Sur 4 millions de litres vendus, j'en ai 4'000 qui sont volés».

Michel, gérant de stations service