Un petit trou, deux petits trous, toujours des petits trous…

Pour notre chroniqueur Philippe Kottelat, les CFF, même s'ils ne sont pas responsables du dernier incident de Tolochenaz, ont multiplié les couacs ces dernières années.

  • Atteindre la perfection japonaise en matière de train, la Suisse en est bien loin. 123 RF

    Atteindre la perfection japonaise en matière de train, la Suisse en est bien loin. 123 RF

Il y a eu un premier trou. Puis, un jour plus tard, un second. Deux petits trous qui ont provoqué la semaine dernière un véritable séisme sur l’axe clé que constitue la ligne ferroviaire Lausanne-Genève. Au regard des grandes problématiques qui occupent la planète, ce n’est pas un drame. Mais ces deux petits trous ont toutefois touché en plein cœur l’artère vitale de la Suisse romande, paralysant le trafic durant plusieurs jours. Des milliers de voyageurs ont été impactés, le retour à la normale va prendre du temps et l’addition s’annonce d’ores et déjà élevée pour les CFF qui, législation oblige, sont aujourd’hui tenus de rembourser une partie des billets en cas de retard ou de suppression de trains. Même s’ils n’y sont pour rien! Comme dans ce cas en l’occurrence, puisque ce sont des travaux faits en marge de la ligne qui sont à l’origine des affaissements qui ont rendu impossible toute circulation.

Cet épisode, et le monde politique valdo-genevois n’a pas hésité une seconde à monter aux barricades pour le dire, a démontré l’extrême fragilité de cette ligne ferroviaire. Une ligne pour laquelle il n’existe aucun itinéraire de contournement… à moins d’un détour par la France via… Belfort et Bâle. On croit rêver! Une ligne en tous cas négligée durant de nombreuses années par les responsables successifs des transports qui ont privilégié la Suisse alémanique au détriment de sa partie francophone. L’occasion était donc trop belle pour relancer l’idée d’une voie supplémentaire sur ce trajet. Ce que propose du reste Vision 2050, la nouvelle stratégie vaudoise en matière de rail avec la création d’une nouvelle ligne entre les deux villes «pour arrêter de bricoler sur la ligne actuelle». C’est bien, même si ça arrive un peu tard! Notre confrère Blick ne s’est ainsi pas gêné de rappeler à Nuria Gorrite, qui en est l’égérie, qu’elle ne défendait pourtant pas cette idée il y a quelques années seulement!

Mais peu importe! Le plus important est sans doute ailleurs. Cette malheureuse histoire et ses immédiates réactions politiques ne doivent en effet pas nous faire oublier que l’ex-régie fédérale est un colosse aux pieds d’argile qui, avec ou sans petits trous, n’a pas cessé de multiplier les fausses notes ces dernières années en supprimant de nombreux trains, en accumulant les retards, en allongeant les temps de trajet et en accroissant les tensions parmi les voyageurs. Son manque d’anticipation à tous les niveaux s’est révélée être catastrophique.

Il est loin le temps où les trains suisses tentaient de ressembler aux trains japonais: propres, ponctuels, rapides et accueillants! Les petits trous de la semaine dernière ne sont donc que les cerises posées sur un gâteau qui sent le rance. En attendant qu’on nous en serve un meilleur, il faudra sans doute beaucoup de temps. De quoi, pour patienter et en guise de consolation, entonner ce petit refrain: un p’tit trou, deux p’tits trous, toujours des p’tits trous, même si dans ce cas bien précis, Serge Gainsbourg, lui, parlait de tickets de métro.