Premier citoyen ou potiche?

POLITIQUE • A quoi sert le président d’un Conseil communal? Celui qu’on considère comme le «premier» citoyen de la commune ne serait-il, durant son année de mandat, qu’une potiche juste bonne à inaugurer les chrysanthèmes?

  • Légende. CRéDIT PHOTO

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Ne serait-il qu’une sorte de mollusque invertébré appelé uniquement à garantir le bon fonctionnement des institutions, à boire des verres lors d’événements officiels et à serrer des mains? Ou reste-t-il in fine un homme – ou une femme – politique qui a le droit de s’exprimer, même de manière non-conventionnelle, sur certains sujets?

Si la question se pose aujourd’hui, c’est notamment parce que, la semaine dernière, les cinq présidents qui se sont succédé au perchoir du Conseil communal lausannois depuis 2016, se sont fendus d’une lettre outrée, véritable rappel à l’ordre, à leur collègue Nicola Di Giulio, actuellement en charge de ce poste. En cause, un entretien que ce dernier a accordé à Lausanne Cités et dans lequel il annonce notamment l’organisation de rencontres entre les conseillers communaux et les commerçants de la ville, pour évoquer ce qu’il appelle le désarroi de ces derniers face à la politique menée par la Municipalité en matière de mobilité. Cette démarche visant à critiquer l’un des thèmes majeurs de la politique municipale a suscité un mini-tollé dans la classe politique.

Rien pourtant dans la loi n’oblige un président de Conseil communal à se placer en retrait de la vie politique active. Rien, sinon des us et coutumes qui le poussent à une sorte de droit de réserve durant les 12 mois que dure sa fonction. Ce que les prédécesseurs de Nicola Di Giulio ont observé avec zèle. Mais pas lui, qui a décidé de casser les codes dans le but de donner la parole à ceux «dont la voix n’est pas suffisamment entendue par la majorité». Une démarche inédite.

Le plus curieux et le plus paradoxal aussi dans tout cela, c’est qu’une ville dont la gouvernance est ultra-majoritairement de gauche (6 municipaux sur 7) puisse s’offusquer de voir un élu de droite, qui plus est président du Conseil communal, lui rappeler qu’elle n’est pas assez à l’écoute d’une partie de la population.

La charge de Nicola Di Giulio sonne ainsi comme une sorte de rappel à l’ordre à l’intention de ceux qui, habituellement, se targuent d’être les grands défenseurs des minorités en tous genres. Lors de son élection au perchoir, l’élu UDC avait précisé que son but était «de faire vivre la fonction de président du Conseil communal». Là, n’en déplaise à certains, il faut avouer qu’il a plutôt bien réussi son coup!