La revanche d'Alejandro

MUSIQUE • Le jeune Lausannois Alejandro Reyes sortira prochainement son premier album pop rock. Ce chanteur guitariste ne se distingue pas uniquement par son talent ou sa voix, mais aussi par le courage dont il a su faire preuve.

  • Alejandro Reyes: une volonté de fer au service d'une passion.

A tout juste 20 ans, Alejandro revient des Etats-Unis où il a passé le mois de mai pour enregistrer son premier album et tourner un clip. Sa précocité lui mérite déjà de nombreuses comparaisons avec le désormais fameux Bastian Baker. Pourtant, ne possédant qu'une seule main, personne n'aurait pu imaginer, il y a quelques années, qu'il pourrait jouer de la musique et encore moins qu'il en ferait son métier. Cette belle histoire commence en 2010 lorsqu'un ami lui offre une guitare pour gaucher afin de l'inviter à s'y essayer. Le jeune homme se fabrique alors lui-même un petit gant plectre qu'il place sur son bras invalide et qui lui permet de jouer sans se blesser. Les mois suivants, il s'acharne sur l'instrument jusqu'à y acquérir une dextérité épatante. En fait, le jeune homme y voit rapidement le moyen de se prouver à lui-même et aux autres qu'il est capable de beaucoup plus que ce que certains veulent lui faire croire. «C'est comme si, à chaque fois qu'une personne m'applaudissait pour ma musique, cela compensait le mal que m'avait fait une autre en me stigmatisant ou en se moquant de mon handicap», explique-t-il, entouré de son agent et d'un ami musicien dans un café lausannois.

Son parcours

Alejandro Reyes est chilien d'origine, ses parents ont quitté le pays pour fuir des conditions économiques compliquées. A l'école au Canada puis en Suisse, il avait du mal à s'intégrer à cause de sa différence physique et de la barrière du langage. «Quand on m'appelait Capitaine Crochet, cela me rendait fou et je ne pouvais répondre qu'en provoquant des bagarres», se souvient le chanteur qui se rattrape maintenant en surjouant un peu l'enfant sage. Les textes de ses compositions, fortement imprégnés de son parcours, n'en sont pas moins universels.

Comme les autres

«Attention, je ne veux pas jouer sur mon handicap pour devenir une bête de foire que l'on exhibe et dont on oublierait d'écouter la musique», avertit le Lausannois d'un ton décidé. Puis, il explique qu'il a particulièrement apprecié que le label qui a parié sur lui l'avait d'abord entendu dans un studio sans constater qu'il était handicapé. Ce mois de juin est chargé pour Alejandro Reyes car il donne une série de concerts, notamment, lors du Transat Festival et d'autres manifestations dans toute la Suisse romande. En plus, il tentera de séduire les programmateurs de radio avec son premier single. Mais, à le croire, il peut déjà fêter la plus importante des victoires: «Maintenant, il arrive qu'un technicien me demande de porter une caisse à la fin d'une répétition. Il s'excuse tout de suite d'avoir oublié mon handicap, mais il ne se rend pas compte du bien que cela me fait.»