Un unijambiste pas comme les autres!

PORTRAIT • Lors du dernier triathlon de Lausanne, de nombreux spectateurs ont écarquillé les yeux en voyant un unijambiste participer à cette discipline sportive très exigeante. Lausanne Cités l’a retrouvé.

  •  Un sportif de haut niveau. VERISSIMO

    Un sportif de haut niveau. VERISSIMO

  • Bruce Warner un sportif de haut niveau. VERISSIMO

    Bruce Warner un sportif de haut niveau. VERISSIMO

Il est né en Afrique du Sud, à Bloemfontein, le 5 juin 1971. Issu d’une famille de sportifs, Bruce Warner jouait avec succès au hockey sur gazon. «J’évoluais au milieu du terrain.» En septembre 1988, il est victime d’un accident de la route. « Nous roulions derrière un pick-up. A un rond-point, un pneu de notre voiture a explosé, la personne qui conduisait a perdu la maîtrise du véhicule qui a buté contre un trottoir. J’ai été éjecté et ma jambe gauche a tapé avec violence contre un réverbère.»

A l’hôpital, on le réveille. «Un médecin lui dit qu’il faut amputer la jambe gauche au-dessus du genou. Le fémur est en morceaux. Plutôt que de se lamenter sur son sort, il évoque la chance: «Et si c’était ma tête qui avait heurté le réverbère?»

Au début, il marche avec des béquilles puis, plus tard, avec une prothèse. Un jour, une tante qui vit au Canada, l’appelle. «J’ai vu des personnes faire du handiski», lui dit-elle. Il a 21 ans. «Je suis allé, pour voir et tout de suite je suis tombé amoureux de ce sport» Il s’entraîne debout sur un ski. « On n’a pas de bâton, mais deux béquilles munies d’un petit ski. » Aux Etats-Unis, où il se rend par la suite, il poursuit dans cette voie, fait partie intégrante d’une équipe «handicap» et s’entraîne comme tout le monde. Bruce Warner participe à des compétitions handiski. Ses résultats sont si bons que la Fédération sud-africaine de ski le sélectionne pour les Jeux paralympiques. Tout au long de sa carrière, il participera à ceux de Nagano en 1998, de Salt Lake City en 2002 puis de Turin en 2006, enfin à Vancouver en 2010.

Renforcer son mental

Les deux derniers JO, Bruce Warner les a préparés en Suisse, dès son arrivée en 2005 «Aux Portes-du Soleil, avec Ski-Valais.» Il travaillait en Angleterre, chez ABB. A Genève, dans cette même entreprise, un poste se libérait. Alors, il n’a pas hésité une seconde et ne regrette pas son choix. Il est électro-ingénieur dans cette institution helvético-suédoise.

Après Vancouver, en 2010, il a mis un terme à sa carrière de skieur. En 2011, Bruce Warner court avec une prothèse spéciale. «Au début, après 200 mètres, j’étais fatigué.» Mais, cela ne l’arrête pas, il en a vu d’autre et s’entraîne. Sa jambe droite, déjà très sollicitée avant, il l’entretien et la muscle. Il renforce davantage son mental, sa concentration, développe d’autres parties de son corps et, en 2013, il participe à un triathlon-sprint.

En août dernier, à Lausanne, Bruce Warner s’est inscrit au Triathlon de Lausanne, sur la distance olympique. «C’était une première pour moi.» Le menu: 1,5km de natation, 40km à vélo et 10km de course à pied. La nage? « Je n’ai pas les épaules de Florent Manaudou, mais mes bras travaillent beaucoup, ils assurent ce qui est important. Quand je sors de l’eau, je prends mes béquilles pour me rendre vers le vélo où ma jambe droite, qui en a maintenant l’habitude, est sollicitée dans le pédalage. En dernier, c’est la course à pied, je mets ma prothèse, ça me prend quelques minutes pour l’ajuster.» Son chrono au bout du bout: 3h 03’10’’2. «Qu’est-ce que j’étais content, je pensais faire 3h15’.» Bruce Warner s’entraîne 6 jours par semaine (2 fois la nage, 2 fois le vélo, 2 fois la course à pied), soit grosso modo 20 km. «Parfois, je combine deux disciplines, j’essaye…» En décembre, à Genève, au Parc des Bastions, il prendra part à la course de l’Escalade. Bruce Warner? C’est une force tranquille au bénéfice d’une forme joyeuse. Athlète extraordinaire, il est aussi un exemple pour tous.