<blockquote>«Aucune entreprise n’a intérêt à se mettre en marge des lois»</blockquote> Pascal Broulis, conseiller d’Etat vaudois en charge des finances
Les sociétés issues de la nouvelle économie sont géniales. Grâce à un marketing habilement ficelé, elles parviennent à faire croire à la population qu’elles lui veulent du bien. Acheter un livre, se déplacer ou se loger, pour moins cher? C’est la grande promesse des géants américains Amazon, Uber et Airbnb.
Cependant, quand on y regarde de plus près, le tableau est moins rose. Selon la dernière étude du Credit Suisse, le constat est sans appel: la contribution réelle de ces sociétés au produit intérieur brut (PIB) des pays concernés est limitée. Un chiffre illustre cette réalité.
Malgré ses dizaines de millions de francs de chiffre d’affaires, Airbnb n’emploie que 28 personnes en France. En Suisse, ils doivent être une poignée. Ce n’est pas le seul reproche qui est fait au site: «Airbnb soustrait des appartements au marché de la location, tonne Catherine Michel, présidente de l’USPI Vaud. De plus, le bailleur n’a pas le produit de ces locations sur internet. Il s’agit clairement de sous-location abusive.»
Un reproche infondé selon Jasmina Salihovic, fondatrice de Chambres d’amis. Celle que l’on surnomme «la reine d’Airbnb» loue des dizaines de logements en Suisse romande. Elle voit dans la plate-forme une révolution technologique… et sociale: «Ce site permet aux personnes qui n’en avaient pas forcément les moyens de voyager. Easyjet a démocratisé les trajets en avion, Airbnb fait de même avec les hôtels en proposant un choix incroyable à des tarifs réduits.»
Hypercapitalisme masqué
Dans les faits, les sociétés de la nouvelle économie représentent une double menace pour les finances publiques. Nous l’avons vu, elles créent peu d’emplois. Pire, elles ne paient quasiment pas d’impôts grâce à d’habiles montages fiscaux. Dans une période où les restrictions budgétaires sont de mise, cela commence à irriter nos élus.
«Il n’y a pas de raison qu’une location, parce qu’elle est le fait de privés, échappe à une taxe de séjour, que des transports payants échappent à toute surveillance ou que des compléments de revenus échappent aux impôts ou à la TVA, rappelle Pascal Broulis, conseiller d’Etat vaudois en charge des finances. À moins de se placer délibérément dans l’illégalité et de vouloir agir clandestinement, aucune entreprise n’a intérêt à se mettre en marge des lois.»
Si ces entreprises majoritairement nées en Californie ont tout pour séduire le consommateur, elles sont d’abord de formidables machines à faire de l’argent pour leurs propriétaires. Cet eldorado sans foi ni loi commence à s’effriter.
À Lausanne, certaines régies réagissent à la sous-location abusive et les dénonciations se multiplient. La prise de conscience se généralise et une réalité se fait jour: la nouvelle économie n’est pas l’eldorado des utilisateurs, mais celui de l’hypercapitalisme.